Hofstetter, Rita (2010). Genève :
creuset des sciences de l’éducation (fin du XIXe siècle – première moitié du
XXe siècle). Genève: Librairie Droz.
Cet ouvrage est «costaud»! Il fait 686 pages, ce qui n’est pas rien. Mais, bien
que son ampleur puisse rebiffer plus d’un lecteur, son contenu est néanmoins accessible. Comme son titre le
laisse entendre, ce livre brosse un tableau de la naissance des sciences de
l’éducation dans la ville de Genève de la fin du 19e siècle jusqu’au milieu du 20e
siècle. L’oeuvre est divisée en trois grandes parties qui couvrent chacune des
périodes charnières des sciences de l’éducation à Genève. La première partie se
penche sur la période allant de 1890 à 1911 et comprend quatre chapitres. On y
découvre les premiers balbutiements des sciences de l’éducation avec notamment
la création de la première chaire de pédagogie à l’Université de Genève. Les
sciences de l’éducation sont alors rattachées aux sciences morales. On y
constate aussi que, très tôt, des chercheurs comme Claparède voudront plutôt
«sortir» les sciences de l’éducation du giron des sciences morales pour les
associer à la psychologie expérimentale. La partie deux est, quant à elle,
découpée en six chapitres et analyse la période allant de 1912 à 1929. C’est
l’époque de la création l’Institut Rousseau (1911-1912). Cette partie scrute à
la loupe aussi les rapports qu’entretient cet Institut avec les milieux de
pratique et avec le mouvement de l’Éducation nouvelle. Nous y découvrons
également les tensions entourant le rattachement de l’Institut (au départ
indépendant) à l’Université de Genève. Enfin, pour l’essentiel, la troisième
partie (1930-1948) – comportant quatre chapitres – analyse deux processus :
celui de l’intégration de l’Institut Rousseau à l’Université et celui de la
diversification des objets de recherches et de ce que l’auteure appelle la
professionnalisation de la recherche en sciences de l’éducation,
professionnalisation qui conduira notamment à la création de la faculté de
psychologie et des sciences de l’éducation de l’Université de Genève. Ce travail a été mené de main de maître. D’abord, sur le plan de sa structure,
l’ouvrage est d’une grande cohérence. Ensuite, l’écriture est limpide et sait
toujours éviter le jargon inutile. L’auteure a fait un travail remarquable de
fouilles dans les archives universitaires et gouvernementales et les férus de
données précises trouveront ainsi en annexes une multitude de renseignements
allant de la liste de tous les enseignants de l’Institut Rousseau, aux thèses
soutenues en sciences de l’éducation, en passant par les titres des revues dans
lesquelles les chercheurs genevois publient, etc. Le lecteur pourra aussi côtoyer
des noms qui sont restés célèbres dans l’histoire. Outre Claparède déjà
mentionné plus haut, on pense à Dottrens, Ferrière, Bovet et, bien entendu, à
Piaget. En définitive, il s’agit d’un livre de qualité qui plaira à quiconque
est intéressé par les débuts des sciences de l’éducation, débuts qui ont vu naître
des tensions qui, rappelons-le, sont toujours présentes aujourd’hui :
discipline / profession; science / militance.
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