Le chercheur soulève le problème
suivant :
L’acquisition de connaissances
implique la relation entre deux générations. La transmission éducative qui
s’opère de l’une à l’autre, les processus relationnels et sociaux qui sont en
cause sont très éloignées des relations dites marchandes… C’est pourquoi le cadre
de pensée utilitariste ne s’avère pas approprié.
« En effet, la position de
donateurs que les membres d’une génération assument ainsi au bénéfice de la
suivante ne les intègre pas à un cycle d’échanges dont ils bénéficieraient en
retour, mais fait d’eux les maillons de la transmission culturelle irréversible
qui va de pair avec la reproduction biologique et la mort. » (Flahaut,
2006, p. 295)
L’humain se façonne grâce à deux types de transmission :
-
Génétique
-
Culturelle
La transmission de connaissances a lieu par le biais du
milieu de vie (au quotidien) et de l’enseignement. L’enfant assimile de
diverses façons :
-
Transmission de connaissances
-
Mimétisme des manières d’être, des pratiques
relationnelles et des savoir-faire.
« Cette transmission qui s’opère dans
l’expérience quotidienne du rapport avec les adultes constitue la base de
l’existence de l’enfant et de sa socialisation. Si ces acquisitions fondatrices
se mettent en place convenablement, elles favorisent ensuite l’acquisition des
connaissances. D’où la nécessité de distinguer entre instruction et éducation. »
(Flahault, 2006, p. 295).
Flahaut commence cette section en
donnant une définition de l’instruction et une définition de l’éducation:
« L’instruction, c’est l’acquisition de
connaissances grâce à l’enseignement. » (Flahault, 2006, p. 296).
Le chercheur précise qu’il est possible d’être éduqué et
socialisé sans être instruit. Toutefois, il est impossible d’être réceptif à
l’instruction s’il y a absence de socialisation. Il souligne que cette
déclaration va littéralement à l’encontre d’une conviction ancrée depuis
longtemps (à l’époque des Grecs) dans la culture occidentale. Cette conviction
enracinée se résume ainsi : l’éducation se ferait par l’instruction. C’est
une erreur de croire que l’instruction est la base de l’éducation.
« On
peut être convenablement éduqué et socialisé sans pour autant être très
instruit. Mais on ne peut pas s’instruire, on ne désire pas apprendre si,
d’abord, on ne bénéficie pas d’une certaine socialisation. » (Flahault, 2006,
p. 296).
« Un professeur est, par définition, quelqu’un
qui a misé sur l’acquisition de connaissances et qui doit à cet investissement
la place qu’il occupe dans la société ; il n’est donc pas étonnant qu’il
partage la conviction que la formation de l’être humain et du citoyen résulte
essentiellement de la transmission du savoir. » (Flahault, 2006, p. 296).
Flahault donne une définition de l’éducation :
« L’éducation, c’est le développement de la
capacité à être soi tout en étant avec les autres, à ménager ses relations avec
eux, à participer à la vie sociale, à intérioriser la culture commune. » (Flahault,
2006, p. 296)
Le chercheur affirme que le processus d’éducation est
fortement lié aux apprentissages. Cependant, il souligne que ces apprentissages
ne passent qu’en partie par l’enseignement. De prime abord, l’éducation
commence par le développement de la communication et du langage (socle commun).
De plus, l’éducation s’orchestre par le biais des relations avec les personnes
de l’entourage. Flahaut décrit le phénomène comme une immersion dans un
environnement social et culturel.
Par rapport au lien social, l’éducation implique un
rapport entre la génération des adultes et la génération des enfants.
L’évolution de l’humanité s’est faite grâce au contact prolongé entre les
générations. Des incontournables :
-
La bienveillance, encouragement (désir de
reconnaissance de la part de l’enfant).
-
La solidité du cadre.
Il est à noter que plus la relation est satisfaisante pour
l’enfant, plus ce dernier aura les habiletés requises pour nouer des relations
avec ses pairs. Si, au contraire, la socialisation se fait mal, le terrain
n’est pas propice à l’acquisition de connaissances.
« Le vivre-ensemble est d’abord le vivre-ensemble
de l’enfant avec les adultes qui s’occupent de lui. Ce rapport ne se limite pas
à une transmission de connaissances ; c’est un lien personnel par lequel un
enfant se trouve encadré, reçoit la possibilité d’exister. » (Flahault,
2006, p. 297).
« Les filles sont plus sensibles aux liens entre
générations dans la mesure où elles portent en elles la possibilité de donner
naissance. Il n’en va pas de même pour les garçons. Chez eux, l’aspiration à
être un homme, liée à des images de virilité, n’a souvent aucun rapport avec
des images de paternité. C’est pourquoi l’adolescence est souvent plus
problématique chez les garçons et peut les enfermer dans une culture mimétique,
une culture d’opposition à celles des adultes, renforçant chez eux le goût de
la transgression qui est inhérent à l’être humain. » (Flahault, 2006, p. 299).
Les enseignants répondent aux
exigences du ministère de l’Éducation. Ils ont sans contredit une importante
responsabilité éducative. Même si les parents sont fortement impliqués dans le
processus de socialisation, l’école y joue également un rôle. Il ne s’agit pas
uniquement d’un lieu de transmission du savoir.
« Réduire l’école à sa fonction de transmission
du savoir, c’est placer au premier plan la fonction informationnelle du langage
en oubliant que celle-ci est enchâssée dans sa fonction
relationnelle-existentielle, ou, pour le dire en termes linguistiques, en
oubliant le fait que tout énoncé est lui-même enchâssé dans un acte
d’énonciation. » (Flahault, 2006, p. 301).
À l’école comme au sein de la vie familiale, la relation
entre les représentants de l’autorité et les enfants ne devrait pas être fondée
sur un contrat.
« Il est pour le moins curieux de voir introduite
à l’école la norme du contrat par ceux-là mêmes qui, souvent, s’inquiètent de
l’emprise du libéralisme économique dans le domaine de l’éducation. » (Flahault,
2006, p. 301).
Par rapport au savoir, le chercheur affirme qu’en donnant
du savoir aux élèves, les enseignants ne sont pas toujours conscients qu’ils
briment le sentiment d’exister des enfants. Ces derniers réagissent
négativement et l’enseignant impute la réaction à la mauvaise volonté, à
l’ignorance ou encore aux difficultés d’apprentissage. Il suffit d’écouter les
élèves pour comprendre que, pour eux, la relation entre le savoir et la réalité
est essentielle (lien entre apprentissages à l’école et environnement de vie).
« La propension à faire du savoir une fin en soi
témoigne de la pente naturelle de l’école qui, comme toutes les grandes
institutions, tend à fonctionner sur un mode autoréférentiel. Or cette
propension autoréférentielle crée d’emblée un malentendu entre professeurs et
élèves. » (Flahault, 2006, p. 302)
Flahault insiste enfin sur le fait que l’instruction et la
transmission de connaissances doivent être reliés dans un processus de
socialisation. Historiquement, l’école s’est malheureusement construite contre
la société.
L’auteur reconnaît l’importance de l’éducation à la citoyenneté.
Il ajoute qu’un enfant sera en mesure de répondre à ses obligations et ses
devoirs de citoyen s’il ressent un bien-être dans ses relations avec les
personnes qu’il côtoie.
« Le bien-être relationnel a des vertus
éducatives, réduire le taux de souffrance des enseignants et des élèves n’est
pas un objectif accessoire. » (Flahault, 2006, p. 303)
En somme, l’auteur rappelle que la vie scolaire doit être
une vie sociale connectée au monde extérieur, à la société dont l’école fait
partie. Des préalables…
- relations de travail et de concertation des enseignants entre eux (au lieu que chacun se trouve toujours seul face à ses élèves comme s’il exerçait une profession libérale);
- relation des profs avec l’administration;
- relation de l’intérieur de l’école avec l’environnement social.
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