Michel Freitag a élaboré une sociologie dialectique qui vise à synthétiser les apports de trois grands courants théoriques : le marxisme, le fonctionnalisme et le structuralisme. Il a systématiquement refusé la réduction de la société à des abstractions économiques (comme c'est le cas dans le marxisme) ou encore à des effets de structures impersonnelles (on pense au structuralisme). Il a plutôt insisté sur la dialectique entre la normativité, les institutions, et la praxis. Sa sociologie repense la place du sujet, de la normativité et du conflit. Elle intègre aussi l'important héritage de la phénoménologie, ce qui lui permet d’éviter la réification du social souvent constatée dans d'autres traditions théoriques. Michel Freitag a proposé une critique qu'on peut qualifier de radicale de la postmodernité et de la domination croissante de la logique technocapitaliste sur l’ensemble de la vie sociale. Il a mis au jour la dissolution de la société en tant que structure de sens ainsi que la marchandisation de l'ensemble des différentes sphères humaines. Son diagnostic dépasse donc les constats d'atomisation ou de fragmentation sociale proposés par d'autres penseurs. Il a fondé sa démarche théorique sur un retour à la question des conditions de toute connaissance sociale. De la sorte, il a marqué le lien entre la sociologie et la réflexion épistémologique. Michel Freitag a critiqué à la fois le scientisme, l’hyperfonctionnalisme et le tournant linguistique. Il les considérait comme déconnectés de l'ancrage ontologique et normative de la sociologie. Sa sociologie insiste justement sur le rôle des normes et de la praxis humaine. Pour Michel Freitag la société est une sorte de structure de pratiques, qui fait sens pour les acteurs et c'est en son sein que se constituent et se transforment les normes de ces derniers. Il a donc toujours refusé tout autant les conceptions hyperdéterminées (Bourdieu ou encore Luhmann) et les visions essentiellement individualistes qui oublient l'importance des institutions dans la vie humaine. Michel Freitag affirmait haut et fort la vocation critique de la sociologie face à la gestion technocratique. Plus globalement, il soutenait que les sciences sociales doivent viser à comprendre les tendances civilisationnelles et à restaurer la question de la normativité dans le monde contemporain. En raison de son élaboration théorique du symbolisme et de la normativité, il faut en mesure de traiter en profondeur les enjeux de sens, d’aliénation et d’écologie culturelle. Son oeuvre est donc nettement supérieure à celles, trop nombreuses, qui se contentent d'une gestion essentiellement descriptive ou instrumentale du monde social.
Référence :
Martineau, S., Buysse, A. (2016). Amorce d’un dialogue entre la vision humaniste de Michel Freitag et les sciences de l’éducation. Dans Éducation et humanisme. Variations. Sous la direction de D. Simard, J.-F. Cardin, L. Levasseur, Québec, PUL, p. 145-162.
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11 novembre 2025
Sur la supériorité de la sociologie de Michel Freitag sur celles de ses contemporains
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
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