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19 août 2020

Honneth et l'éducation

 

En proposant le retour à une éducation classique (au sens essentialiste, c'est-à-dire, visant la quête de fondements et de piliers moraux pouvant orienter les mœurs et coutumes), Axel Honneth, ouvre la porte à une importante réflexion sur le sens que nous donnons désormais à l’éducation. D’ailleurs, le penseur allemand, comme plusieurs avant lui, nous invite à considérer l’éducation comme moyen d’émancipation, comme moyen d’accès à la vertu, mais non pas une vertu reposant sur un idéal transcendantal, mais plutôt comme un idéal dialectique et évolutif. Il semble donc que cette conception émancipatrice de l’éducation, non pas au sens socio-économique du terme, avec pour visée le service du grand capital, mais bien au sens moral du terme, mérite d’être remise à l'ordre du jour. Cela permettrait éventuellement de redéfinir les programmes scolaires, les politiques publiques entourant l’éducation pour ainsi remettre les fondements de l’éducation en vitrine. Pourquoi ne pourrions-nous pas assister à l’avènement d’une société où le calcul utilitariste entre le niveau de scolarité et le type d’emploi obtenu ou de travail effectué n’irait plus de soi ? Ne serait-il pas envisageable d’opérer, au contraire, une forte déconnexion entre les emplois visés et les niveaux de scolarités limites qui sont visés ? En suivant Honneth, devrait, il serait possible de remettre de l’avant le caractère moral et éthique de l'éducation qui était présent déjà chez les Grecs et qui, au fil du temps, s’est considérablement effrité. Toutefois, en considérant le fait que la très forte adéquation entre éducation et marché du travail persiste, bon nombre de citoyens ne voient pas l’intérêt de poursuivre leurs parcours académiques au-delà du niveau nécessaire pour l’emploi auquel ils aspirent. Le pouvoir politique aurait avantage selon moi à se faire le porte-voix d’une nouvelle conception de l’éducation et positionner celle-ci au cœur des différentes politiques publiques, permettant le transfert d’une approche curative vers une approche préventive. Non seulement, une société mieux formée est une société plus démocratique, mais une société mieux formée semble en mesure de mieux surmonter les problèmes sociaux auxquels elle est confrontée. Les pays nordiques semblent à cet égard pouvoir être pris en exemple pour illustrer la force et le potentiel de la promotion d’une éthicité démocratique par l’État.

Références :

Honneth, A. (2000).  La lutte pour la reconnaissance (traduit par Pierre Rush, éd. originale allemande 1992). Les Éditions du Cerf.

Honneth, A. (2006).  La société du mépris.  Vers une nouvelle Théorie critique (traduit par Olivier Voirol, Pierre Rush et Alexander Dupeyrix). La Découverte.

Honneth, A. (2007).  La réification : Petit traité de Théorie critique (traduit par Stéphane Haber, éd. originale allemande 2005). Gallimard.

Honneth, A. (2008).  Les pathologies de la liberté : Une réactualisation de la philosophie du droit de Hegel (traduit Franck Fischbach, éd. originale allemande 2001). La Découverte.

Honneth, A. (2013).  Un monde de déchirements (traduit par Pierre Rusch et Olivier Voirol). La Découverte.

Honneth, A. (2013).  Ce que social veut dire : 1. Le déchirement du social (traduit Pierre Rusch éd. originale allemande 1990 et 1999 ; 2007 ; 2010). Gallimard.

Honneth, A. (2015).  Ce que social veut dire : 2. Les pathologies de la raison, trad. Pierre Rusch, Paris : Gallimard (éd. originale allemande 1990 & 1999 ; 2007 ; 2010).

Honneth, A. (2015).  Le droit de la liberté : Esquisse d’une éthicité démocratique (traduit par Frédéric Joly et Pierre Rusch, éd. originale allemande 2011). Gallimard

Honneth, A. (2015). L’éducation en démocratie : un chapitre négligé de la philosophie politique. Dans C. Bouton et G. Le Blanc (dir.), Capitalisme et démocratie. Autour de l’œuvre d’Axel Honneth (p. 18-19). Éditions Le Bord de l’eau.

Honneth, A. (2017).  Critique du pouvoir. Michel Foucault et l’École de Francfort, élaborations d’une théorie critique de la société (traduit par Pierre Rusch et Olivier Voirol). La Découverte

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