À
la suite de Gadamer,
nous ne pouvons adhérer à une vision positiviste de l’histoire. Car,
notre relation à l’histoire est fondamentalement celle d’une appartenance. Notre
historisme, contrairement à celui que critiquait Gadamer, ne postule pas une succession de mondes
clos sur eux-mêmes. Nous
sommes exposés à l’histoire; le passé se conserve malgré ses transformations et
nous parle à travers ce que Gadamer nomme la tradition (qui n’est pas nostalgie d’un monde ancien). Nous
pensons l’histoire à partir de notre situation, notre vision est donc toujours
finie, mais l’horizon qui est le nôtre se déplace avec nous. Le
passé n’est donc pas altérité absolue. Ce
qui fut horizon du passé peut rencontrer l’horizon du présent : ce que Gadamer
appelle fusion des horizons. Cette
fusion des horizons est possible du fait que je suis conscient d’être exposé
aux effets de l’histoire et donc que l’histoire agit dans mes actes de
compréhension. En
proposant l’idée de fusion des horizons, Gadamer réfute à la fois l’objectivisme (qui ne
se pense pas comme conscience historiquement ancrée) et l’idéalisme (de type
hégélien) qui pense l’histoire comme horizon unique (l’histoire comme avènement
de la Raison). Le
passé est continuellement compris à partir de l’horizon du présent, il est
réinterprété par rapport à notre situation présente. Pour
nommer ce processus, Gadamer parle d’application. Bien
qu’il agisse sur nous, on ne subit pas simplement le passé, nous agissons sur
lui et, ce faisant, nous agissons sur nous. Si
nous ne sommes jamais de parfaits innovateurs, nous sommes pas non plus de
simples suiveurs. En
fin de compte, à l’instar de l’herméneutique nous pensons l’histoire comme
expérience ( celle d’être exposé aux effets de l’histoire). Ce
faisant, nous ancrons l’histoire dans la mémoire «puisque l’action continue du
passé qui définit la tradition implique que cette dernière opère comme mémoire
(individuelle et collective)» (Vultur, 2017, p. 260).
•Gadamer, H.-G. (1996a). Vérité et méthode. Les grandes
lignes d’une herméneutique philosophique.
Paris : Seuil. 1ère édition parue en allemand en 1960.
•Gadamer,
H.-G. (1996b). La
philosophie herméneutique. Paris : PUF.
•Vultur, I. (2017). Comprendre. L’herméneutique et
les sciences humaines. Paris : Gallimard.
Collection Folio essais.
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