«Des intellectuels québécois engagés dans la lutte antiraciste font valoir que le rejet des Noirs compose la trame principale du passé québécois. Il serait au cœur de notre devenir : l’identité nationale et la nation elle-même se seraient construites sur cette base et s’en seraient nourries. L’esclavagisme aurait sévi au Québec au même titre qu’aux États-Unis et en Amérique latine, mais nos élites se seraient soigneusement employées à cacher ce fondement honteux de notre nation.
À cause de son excès, cette thèse est aussi fausse que maladroite. Fausse parce qu’elle s’appuie sur des bases scientifiques déficientes, maladroite parce qu’elle indispose nombre de Québécois qui seraient des alliés naturels dans le combat antiraciste.
Une autre conséquence découle de tout ce qui précède : les vieilles luttes québécoises contre le colonialisme et pour l’émancipation collective se trouvent tout à coup non seulement marginalisées, mais dépouillées de leur légitimité. Une réaction s’impose : il faut sauver le néonationalisme québécois et l’idéal de la souveraineté.
Parce qu’elles versent dans l’excès, ces contestations de bonne foi servent mal la cause même de l’antiracisme au Québec.»
Gérard Bouchard, Le Devoir, 13 février 2021.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire