À la suite de Gauthier (1993), nous
faisons la supposition que la pédagogie apparaît réellement au dix-septième
siècle. En effet, c'est à ce moment que les problèmes scolaires conduisent à
une codification des façons de faire l'école (qui deviendra tradition). Il
apparaît donc que dès ses débuts, la pédagogie comporte une préoccupation
pragmatique liée à une activité de mise en ordre d'un collectif (les élèves) et
un souci de formation des futurs enseignants (recueillir le savoir des
praticiens afin qu'il ne se perde pas et puisse servir aux nouveaux enseignants).
Il y a une situation pédagogique fondamentale
Cette situation pédagogique
fondamentale met en scène un enseignant en rapport obligatoire avec un groupe
d'enfants dans le but de transmettre une tradition culturelle. La pédagogie est
un travail qui porte sur l'humain en collectif (un auditoire). Cet aspect lui
confère une dimension rhétorique et interactive.
La pédagogie a une histoire
La pédagogie, parce qu'elle s'est
constituée depuis le dix-septième siècle, offre au praticien et au chercheur le
visage d'une discipline dont les savoirs se sont construits au fil d'une
histoire particulière. Il y a donc une historicité des savoirs sur la façon
d'enseigner : par exemple de la pédagogie traditionnelle à la nouvelle
pédagogie. Dans l'esprit de l'herméneutique, histoire et tradition forment une
culture commune compréhensible et pouvant être dépassée.
La pédagogie a une identité
La pédagogie a une identité qui lui
est propre bien que cette discipline éprouve visiblement des difficultés à se dire
et à se définir. La pédagogie n'est pas une science et n'est pas un art. Elle
est beaucoup plus discours d'ordre en vue d'une activité précise : l'éducation
et l'instruction. Ce discours, relevant de la raison pratique, repose, non pas
uniquement mais en grande partie, sur l'interprétation et l'argumentation.
Il faut chercher à fonder la pédagogie autrement que sur la tradition ou sur
la science
Pourquoi ? Parce que d'une part, la
tradition finit toujours par ne plus correspondre à la réalité et, d'autre
part, les pédagogues font appel à des savoirs qui ne sont pas uniquement —
principalement — scientifiques. En conséquence, la pédagogie apparaît comme une
activité langagière argumentative qui se sert à la fois de la tradition et de
la science — mais aussi de bien d'autres types de savoirs — pour nourrir le
jugement. Les savoirs du pédagogue sont pluriels et sa rationalité ne se limite
pas à la rationalité scientifique.
La pédagogie met en scène une technique aux modulations infinies : la séduction
La pédagogie met en scène une technique aux modulations infinies : la séduction
La pédagogie s'inscrit dans un
rapport à l'autre. Ce rapport à l'autre s'actualise dans un but premier :
l'apprentissage. Comme l'autre ne partage pas obligatoirement le même but, la
pédagogie cherche donc à le contrôler. Pour assurer ce contrôle, elle doit
ruser, séduire, afin de gagner la joute de l'apprentissage. Parler de ruse et
de séduction c'est parler de persuasion. Or, il s'agit là d'éléments qui
commandent un encadrement éthique. La pédagogie comportera donc une forte
dimension éthique.
La pédagogie appelle une écriture qui lui est propre
La pédagogie exerce une action qui
modifie l'autre dans un sens précis. Cette modification n'est possible que dans
la mesure où elle réussit à persuader l'autre que le but qu'elle poursuit (l'apprentissage
d'un contenu culturel particulier) s'avère légitime. Pour ce faire, elle doit
déployer des arguments qui dépassent la logique : elle nécessite un travail sur
la manière de dire, sur la façon d'organiser le récit. Par le fait même, la
pédagogie est une activité discursive rhétorique.
La pédagogie est une affaire de jugement
L'activité éducative est d'une
extrême complexité car elle se réalise dans un contexte mouvant. Elle ne peut
donc être saisie totalement par la tradition et la science. C'est pourquoi,
face au contingent, le pédagogue se doit d'exercer son jugement. Or, il semblerait que le
jugement ne s'enseigne pas, ne peut pas s'apprendre, mais il s'exerce. L'exercice de
ce jugement peut constituer une jurisprudence : une mise en ordre du savoir
d'expérience. Par conséquent, le jugement pourrait nourrir un savoir et se
nourrir de lui.
La pédagogie présuppose la culture
Si le jugement ne s'apprend pas, il
peut tout de même être soutenu. Ce sera justement là le rôle de la culture. En
effet, cette dernière permet de s'alimenter en connaissances en vue d'une
action. La culture du pédagogue sera constituée bien sûr de ce qu'on appelle la
culture générale mais aussi des savoirs propres à son champ d'activité :
savoirs professionnels, curriculaires, disciplinaires, d'expérience.
La pédagogie a un but
La pédagogie est une discipline qui cherche à accroître son efficacité afin que
les élèves apprennent plus, plus vite et mieux. Elle est centrée sur l'action
et prend tout son sens dans cette recherche de l'amélioration de la pratique
d'enseignement en classe. La pédagogie fait donc appel à la praxéologie.
RÉFÉRENCE : Clermont Gauthier, Tranches de savoir, Montréal, Éditions Logiques, 1993.
RÉFÉRENCE : Clermont Gauthier, Tranches de savoir, Montréal, Éditions Logiques, 1993.
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