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31 août 2014
Sagesse
On ne possède jamais la sagesse, on la cherche tout simplement.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Beauté
La beauté est dans ce qui nous dépasse et ce qui nous dépasse n'est parfois qu'un petit geste, une petite parole.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Espoir
Il suffit parfois de peu pour perdre espoir mais il suffit également de peu pour le retrouver.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
30 août 2014
Perte de respect
Certains déplorent que nous n'ayons plus de respect pour nos institutions politiques. Mais, à qui la faute ? Combien de politiciens sont à la hauteur de ce qu'est l'État ?
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Démocratie et dictature
La démocratie demande de l'intelligence, la dictature, elle, n'exige que la bêtise.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Pantins
Sur la scène politique nous voyons bien des pantins s'activer mais rarement de vrais hommes (et de vraies femmes) d'État.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
29 août 2014
Vision gestionnaire
Quand les universités auront évincé le dernier des intellectuels et qu'elles n'abriteront plus que des techniciens de la science, les gestionnaires de tout poil seront bien heureux.
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Inculture
Il faut toujours se demander à qui profite l'inculture d'une nation.
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Armée de serviteurs
Année après année, nous élisons une armée de serviteurs à la solde des très puissants et non au service du peuple.
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Dans une vraie démocratie
Dans une vraie démocratie, il n'y aurait pas de lobbyistes.
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Question sur les gouvernants
Je me demande souvent si nos gouvernants sont malhonnêtes ou s'ils sont réellement convaincus des bêtises qu'ils nous servent sans relâche.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
28 août 2014
Ouverture d'esprit
L'ouverture d'esprit est une condition nécessaire pour qu'une discussion puisse être fructueuse. Autant dire que cela arrive rarement !
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Plonger au coeur du réel
Dans le discours commun on oppose souvent théorie et pratique. La première serait éloignée de la «réalité», la seconde y serait intimement ancrée. Il s'agit là d'une vision naïve des choses. En fait, la théorie, la pensée abstraite, n'est pas déconnectée de la réalité. Plutôt, elle cherche à en rendre compte d'une manière plus rigoureuse que l'appréhension immédiate ne peut le faire. Par la recherche des causes et des effets ou par l'analyse herméneutique, la théorie plonge au coeur du «réel».
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Réflexion sur la formalisation des savoirs enseignants
A) Perspective historique
Il est possible d'identifier un certain nombre de périodes
importantes qui marquent l'évolution de la recherche sur l'enseignement aux
États-Unis. L'approche des traits de
personnalité durant la première moitié du siècle, l'évaluation des méthodes
après la deuxième guerre, les systèmes d'observations durant les années
cinquante et soixante, les approches processus-produit durant les années
soixante-dix, et d'autres perspectives de recherche plus récentes depuis les
années quatre-vingt, inspirées principalement de l'ethnométhodologie et des
sciences cognitives constituent, pour l'essentiel, les grands mouvements de
recherche sur l'enseignement.
Au début du siècle l'efficacité de l'enseignement était vue
principalement sous l'angle de certains traits de personnalité de l'enseignant
(enthousiasme, chaleur, etc) et la recherche était orientée vers
l'identification de ces traits (Medley dans Peterson et Walberg, 1979, p. 12). Medley (1979) mentionne que ce type de
recherche prend son origine dans des travaux aussi reculés que ceux de Kratz en
1896. Ils ont été suivis par beaucoup d'autres, notamment l'étude de Hart
auprès de 10 000 étudiants en 1934, à qui on demandait leur perception des
traits caractéristiques des professeurs qu'ils aimaient le mieux. Puis, on modifia l'approche et on fit appel
aux experts; déjà en 1930, une étude (Barr et Emans, cité par Medley, 1979, p.
13) dénombrait 209 échelles de notation des comportements de l'enseignant par
des juges. Il est important de
mentionner que ces listes caractérisaient les enseignants «perçus» comme
efficaces (Medley, dans Peterson et Walberg, 1979, p. 13). Rien ne prouvait cependant que les traits
indiquées par les répondants correspondaient réellement à une efficacité de
l'enseignement dans la classe même.
Ces premières tentatives de recherches sur l'enseignement
présentaient plusieurs défauts méthodologiques qui ont été signalés par la
suite. En effet, en 1953, le Committee on Criteria of Teacher
Effectiveness déplorait que les recherches menées durant les quarante
dernières années, donc depuis le début du siècle, ne donnaient à peu près aucun
résultat significatif (Dunkin et Biddle, 1974, p. 13). Pour Dunkin et Biddle (1974), outre des
défauts méthodologiques et théoriques importants, les recherches sur
l'enseignement présentaient la carence majeure de ne pas observer l'enseignant
concret dans la classe et de se limiter à une sorte de représentation idéale de
l'enseignant sans examiner le processus même d'enseignement en contexte
réel. On cherchait plutôt, à partir de
notations faites par les directeurs d'école, les élèves, les superviseurs, à
évaluer l'efficacité de l'enseignement.
Rosenshine (1971, p. 12) indique que: «In previous research on teaching, the focus was on measuring the teacher,
on obtaining data about the teacher's education, intelligence, experience, and
scores on a variety of personnality and attitude tests, and on relating this
information to measures of student gain.
Such research has been unproductive to date (see Ackerman, 1954; Getzels
and Jackson, 1963; Gage, 1963; Morsh et Wilder, 1954).»
D'autres recherches ont tenté de mesurer l'efficacité de
l'enseignement non pas en regard de certains traits de l'enseignant mais plutôt
à partir du rendement de certaines méthodes (Medley, 1979). Mais ce type de
recherches qui comparait quelques classes où différentes méthodes étaient
utilisées présentait plusieurs défauts méthodologiques importants. En utilisant l'étudiant (et non l'enseignant)
comme base d'analyse, les effets de la méthode étaient alors confondus avec les
différences entre les enseignants. Morsh
et Wilder (1954) de même que Medley et Mitzel (1963) ont conclu à
l'inefficacité de ces recherches qui n'ont pas réussi à lier d'une manière sans
équivoque un comportement spécifique de l'enseignant à la réussite scolaire
(Brophy et Good, 1986).
Il importe de souligner
qu'avant 1960, l'observation systématique des comportements de l'enseignant
dans les classes mêmes était chose rare (Medley, dans Peterson et Walberg, p.
15). Un peu dans les années cinquante,
mais surtout durant les années soixante, plusieurs études ont été réalisées qui
présentaient des observations de l'enseignement. Durant cette période on dénombre pas moins de
79 systèmes différents pour observer la classe (Dunkin et Biddle, 1974). Sans doute que les commentaires de Gage
(1963) dans le premier Handbook of Research on Teaching ont été entendus
à l'effet que les recherches antérieures sur l'enseignement traitaient la
classe comme une «boîte noire» sans chercher à observer ce qui s'y passait
réellement. Cependant l'accent semble avoir plus été mis sur l'observation des
activités dans la classe que sur la recherche de l'efficacité de l'enseignement. «In
spite of the sharp increase in studies of classroom events, most recent
research has focused on the activities rather than the effects of
teaching» (Dunkin et Biddle, 1974, p. 16).
Cela a eu pour effet de produire des études qui pouvaient décrire assez
en détail ce que l'enseignant faisait, mais qui n'aidaient en aucune façon à
déterminer l'efficacité des pratiques puisqu'elles n'étaient pas mises en
relation avec la réussite scolaire.
Parallèlement à cela, les années soixante ont été marquées par
toutes sortes de courants d'idées et de recherches qui ont eu pour conséquence
de jeter dans l'ombre les recherches sur l'efficacité de l'enseignement. D'abord, deux études (Coleman, 1966; Jencks,
1972) ont été particulièrement importantes et ont contribué à laisser croire
que l'enseignement n'était pas une variable importante dans l'explication des
performances des élèves comparativement à l'influence prépondérante de leur
milieu social. Outre le fait d'être critiquables
sur le plan méthodologique (Gage, 1985), ces études ont eu pour conséquence
d'entretenir l'idée qu'il n'était pas nécessaire d'améliorer la performance des
enseignants. Un autre courant d'idées,
également fort important, mettait l'accent essentiellement sur
l'apprentissage. Sous l'influence du
béhaviorisme et de Piaget notamment, les recherches sur l'apprentissage et le
développement ont foisonné (Travers, 1973).
Cependant leur défaut a été de ne pas rendre explicites les
comportements que l'enseignant devait manifester pour favoriser
l'apprentissage. De plus, ces recherches
étaient réalisées en laboratoire ou en clinique et avaient donc un plus faible
potentiel de «transférabilité» dans les classes. C'est ce qui faisait dire à Jackson (1966)
cité par Dunkin et Biddle (1974) : «Although
he might wince at the appellation, the learning theorist is the private tutor
par excellence. Rarely if ever does he
deal with a group - a flock of pigeons, or a tribe of monkeys. Imagine his horror if faced with a pack of
rats to instruct in bar-pressing!» (p.
22). Enfin, les grands projets nationaux
de réforme du curriculum aux États-Unis durant les années soixante en
mathématiques (SMSG), en biologie (BSCS), en physique (PSSC), en chimie (CHEM),
de même que les efforts pour construire des «teacher-proof curricula» ont
occupé une part importante des énergies et ont laissé entendre que la recherche
sur les programmes était plus importante que la recherche sur l'enseignement.
Une question incontournable occupe donc l'avant de la scène à ce
moment-là: est-ce que les enseignants font réellement une différence ou si les
classes sociales, les programmes scolaires, le développement déterminent à eux
seuls la performance des élèves? Il faut
dire que, durant les années soixante, outre les recherches d'observation de la
classe, s'était déjà amorcé un travail de recherche sur l'efficacité de
l'enseignement dans une perspective processus-produit où les comportements de
l'enseignant étaient mis en relation avec l'apprentissage de l'élève. Ce type de recherche visait à mettre en
évidence les comportements stables de l'enseignant qui pouvaient conduire à un
meilleur rendement scolaire des étudiants.
Le premier Handbook of Research on Teaching (1963) a joué un rôle
de catalyseur en ce sens. Puis, au début
des années soixante-dix, on commence à voir apparaître des synthèses de
recherches sur l'enseignement, notamment Rosenshine (1971) et surtout Dunkin et
Biddle (1974) qui ont beaucoup stimulé le travail dans cette direction. Dunkin et Biddle (1974) présentent leur
ouvrage synthèse comme étant «the first
text yet written that concerns the study of teaching» (p. vii). Il y a eu, disent-ils, dans le passé beaucoup
d'écrits et d'expériences pédagogiques tentées mais peu d'auteurs ont basé
leurs recommandations sur l'évidence des résultats de recherche plutôt que sur
l'assurance de leur conviction (commitment). De même, Dunkin et Biddle (1974) ont recensé
depuis les années cinquante plusieurs recherches sur l'enseignement, mais elles
n'avaient jamais fait l'objet de synthèses systématiques. Également, à partir de leur modèle de
l'enseignement puisé chez Mitzel (1960) comprenant quatre classes de variables
(Presage, Context, Process, Product),
ils ont contribué à populariser les recherches de type processus-produit qui se
sont multipliées par la suite. Brophy et
Good (1986) indiquent également l'influence déterminante qu'a eu l'article de
Rosenshine et Furst (1973) dans la deuxième édition du Handbook of Research
on Teaching pour stimuler la recherche dans les classes. On commençait alors à identifier des patterns
de comportements qui pouvaient distinguer un enseignant efficace d'un autre,
posé comme inefficace (Medley, 1979, p.15).
Les recherches sur l'enseignement, surtout de type
processus-produit, ont eu beau se multiplier dans les années soixante-dix elles
n'ont pas réglé, on s'en doute, tous
les problèmes du système éducatif pour autant.
L'Amérique connaissait une crise économique majeure au début des années
quatre-vingt et plusieurs acteurs importants ont tenu l'éducation, en raison de
ses performances médiocres, responsable de ces problèmes sociaux (A Nation at Risk, 1983; Carnegie Task Force on Teaching as a
Profession, 1986). Plus
particulièrement, les facultés d'éducation ont été pointées du doigt pour
n'avoir pas su former adéquatement des maîtres compétents. Si l'éducation va mal, disait-on, c'est,
d'une certaine manière, lié à ceux qui enseignent, alors il faut
professionnaliser davantage le métier et améliorer la formation des futurs
intervenants. Mais le métier de
l'enseignement ne peut se professionnaliser et partant, améliorer les
performances des élèves, s'il n'est pas basé sur des savoirs spécialisés comme
dans d'autres professions. Or, pour
spécifier ces savoirs, il faut stimuler un fort mouvement de recherche afin de
déterminer une base de connaissances (knowledge base) propre au métier
d'enseignant. «By knowledge base, we mean the entire repertoire of skill,
information, attitudes, etc., that teachers need to cary out their classroom
responsabilities.» (Tom et Valli, p. 5). Il s'agissait désormais de tenter
de synthétiser, par des méta-analyses et des revues de recherches, les
résultats d'une quantité impressionnante de travaux menés depuis le début des
années quatre-vingt pour en arriver à dégager des résultats qui pourraient
guider la pratique (Wang, Haertel et Walberg, 1993). «Research
synthesis makes the 1980 an extraordinary time in the history of research on
teaching» (Walberg, 1986, p. 214). La méta-analyse est donc d'une certaine
manière, le prolongement des recherches de type processus-produit (Shulman,
1986, p. 10) au sens où elle rendait possible, au-delà des cas particuliers, la
généralisation des résultats.
Mais les approches de recherche sur la détermination d'une base de
connaissances dans une visée de professionnalisation ont foisonné depuis une
douzaine d'années et les recherches de type processus-produit n'occupent plus
la totalité de l'espace conceptuel. Même
si le paradigme de recherche processus-produit a contribué à la majeure partie
des recherches, il a fait également l'objet de nombreuses critiques. Par exemple, les recherches d'inspiration
ethnographiques ont fait ressortir les limites d'une vision additive des
comportements de l'enseignant et l'importance de la signification des
comportements de l'enseignant pour les élèves par une description minutieuse
des événements qui se déroulent dans la classe. D'autres ont insisté sur les
processus de pensée de l'enseignant et débordé ainsi la seule partie visible de
ses comportements.
B) Problèmes reliés à la détermination d'une
base de connaissances en enseignement.
1- Problèmes épistémologiques.
Régulier ou singulier. L'enseignement dans une
classe peut être considéré comme une activité si singulière qu'il ne peut en
aucune façon conduire à quelque forme de généralisation que ce soit; par
contre, l'enseignement peut également être vu comme présentant une structure
assez stable pour être étudiée. Cette
dernière affirmation est la position de Dunkin et Biddle (1971) avec laquelle
nous sommes en accord: «The authors of
this book assume that activities of teching are reasonable, natural, rational
events. They have discoverable causes and effects. Though conducted by human
beings who have unique perspectives and aspirations for them, the activities of
teaching have an observable, existential reality that is not divergent from any
other set of observable events». (p.
12). Plus loin, les auteurs affirment
encore: «Although each teaching situation, each classroom, indeed each pupil,
is a unique event, in many ways the process of teaching is surprisingly
invariant across the United States, and throughout the Western world.»
(Dunkin et Biddle, p. 32). Concevoir que
la situation d'enseignement possède une structure stable qui puisse par la
recherche donner naissance à des lois ou à des règles de fonctionnement de
l'enseignant dans la classe n'empêche en aucune façon de penser aussi qu'elle
recèle en même temps une singularité telle qui fait qu'on ne soit pas capable
non plus, à cause des dimensions contradictoires de la situation d'enseignement,
d'appliquer mécaniquement la règle au cas.
Général ou spécifique. Quand on essaie de synthétiser les résultats
de recherche sur une base de connaissance pour enseigner on a tôt fait de se
buter à un problème important: doit-on ne tenir compte que de l'enseignement en
général ou encore faut-il prendre en compte la spécificité du contexte, de la
matière, de l'ordre d'enseignement, du milieu socio-économique? Par exemple, certains auteurs peuvent faire
valoir que si, pour l'apprentissage, il y a des processus généraux qui
transcendent les matières (Gagné, 1970), de la même façon, pour l'enseignement,
il serait possible de retrouver de tels
processus. Par contre, la recherche a
montré aussi des différences notables en ce qui concerne, par exemple, l'enseignement
de différentes matières ou encore les ordres d'enseignement (Gage, 1979, p.
269). Ce dernier auteur fait voir le nombre impressionnant de variables qui
devraient être ainsi prises en compte.
Par exemple, des recherches pourraient être menées pour chacun des
degrés scolaires en regard d'objectifs spécifiques de chacune des matières par
rapport à différents types d'étudiants et compte tenu du milieu
socio-économique. On a alors affaire à
des milliers de possibilités de variables à mettre en relation. Étant donné que les dimensions générales ou
spécifiques de l'enseignement ont autant d'importance les unes que les autres,
Gage propose, pour solutionner ce dilemme, un modèle hiérarchique qui va du
général au particulier et qui permet de prendre en compte les divers degrés de
précision. Malgré son intérêt et ses
limites, son modèle ouvre cependant une piste de réflexion qui méritera d'être
examinée plus avant. En effet, tout
comme il semble difficile de concevoir qu'il n'y a pas une certaine manière
universelle d'enseigner avec efficacité dans une même structure, de même on ne
peut penser qu'il n'y a pas non plus, compte tenu des éléments de contextes qui
présentent une certaine stabilité, des éléments de spécificité qui se répètent
en fonction du contexte selon la matière, le degré scolaire, la clientèle
urbaine ou rurale, etc.
Décrire et prescrire. La recherche sur l'enseignement s'inscrit
dans un cadre éthique précis. Nous
référons ici à la classe standard, c'est-à-dire non pas à des expériences ou
courants pédagogiques typiques qui appellent la mobilisation de valeurs
particulières et des comportements spécifiques de l'enseignant, comme dans la
pédagogie ouverte ou la pédagogie Freinet, mais plutôt à cette façon à la fois
ancestrale et moderne d'enseigner qui consiste dans la situation où un maître
se retrouve face à une trentaine d'élèves et où il fait appel parfois à un
curieux mélange de leçons magistrales, de questions ouvertes, de support
technique informatique, etc. Bref, c'est
de cette espèce de classe standard dont il s'agit et qui constitue non pas
l'exception mais la normalité des classes de nos jours un peu partout en
Occident. Cette classe standard
constitue une sorte de cadre éthique donné dans lequel il y a certaines
pratiques enseignantes qui peuvent présenter plus d'efficacité que
d'autres. Nous posons que la recherche
sur l'enseignement peut permettre l'étude des pratiques enseignantes et leur
comparaison sur le plan de leur efficacité.
Il faut bien comprendre ici que nous ne prétendons en aucune façon que
la science peut permettre de déterminer les finalités; au contraire, nous
affirmons que, dans un cadre éthique donné - la classe standard- la science
peut informer sur l'efficacité de certaines pratiques.
Approches complémentaires ou contradictoires. La plus grande quantité de recherche vient de
l'approche processus-produit où les comportements du maître sont mis en
relation avec les performances des élèves.
Les limites de cette approche ont été cernées et plusieurs auteurs ont
plaidé plutôt pour une approche d'orientation davantage ethnométhodologique au
sens où les comportements de l'enseignant devaient être interprétés en regard
de leur signification pour les étudiants.
Enfin, une troisième approche dite d'orientation cognitive part de
l'idée que les comportements de l'enseignant sont dictés par ses idées et que
pour connaître ce qui se passe dans la classe on doit référer à ce qu'induit le
professeur par ses pensées. Gage (1989), Biddle et Anderson (1986), de même que
Shulman (1986) plaident pour la complémentarité des approches. On ne voit pas pourquoi les divers paradigmes
de recherches devraient être mis dans une sorte d'opposition stérile. Ces paradigmes partent de présupposés
différents et font voir des éléments complémentaires de la réalité. «As Merton (1975) led us to anticipate, the
alternative research programs do not supplant one another so much as provide
opportunities to examine particular aspects of teaching more closely. Each paradigm highlights a particular
neighborhood on the synoptic map, leaving other territories dark and
unexplored.» (Shulman, 1986, p. 14).
Une science de l'enseignement ou une base scientifique à l'art
d'enseigner. L'idée de construire une
science de l'enseignement semble caressée par plusieurs auteurs (Dunkin et
Biddle, 1974; Brophy et Evertson, 1976; Wang, Haertel et Walberg, 1993). C'est probablement ce qui rend le mouvement
du «knowledge base» si suspect aux yeux de certains. Pour notre part, nous préférons plutôt la
position de Gage à l'effet qu'il pourrait y avoir une base scientifique à l'art
d'enseigner. «In the meantime, we must recognize that most of what we have as a
scientific basis consists of statistical relationships between teaching
practices and student achievement of the knowledge, understanding, attitudinal,
and conduct objectives of education.
Applying that scientific basis in the heat of classsroom interaction
still relies primarily on artistry. But
knowledge of the relevant relationships allows teachers to base their artistry
on something more than hunch, feeling, intuition, unaided insight, or raw
experience.» (Gage, 1985, p. 6). En
ce sens, les résultats de la recherche informent l'enseignant dans l'exercice
de son métier mais ne sont pas applicables mécaniquement.
Cette difficulté d'application des résultats de la recherche aux
cas particuliers n'est pas propre aux sciences de l'éducation. Dans toutes les
sphères professionnelles, le savoir scientifique n'est jamais présent en entier.
L'ingénieur qui construit le pont n'utilise pas seulement un savoir
scientifique; il applique avec art les connaissances générales que lui
fournissent diverses disciplines contributrices à une situation unique: le pont
X à l'endroit Y dans le contexte Z. Le
médecin fait de même dans son traitement d'un patient de tel poids, avec telles
habitudes de vie, telle pression artérielle, tel emploi, etc. Pourquoi n'en serait-il pas de même pour
l'enseignant qui, possédant des connaissances nomothétiques, aurait affaire à
des problèmes particuliers dans sa classe.
«The problem to which the
nomothetic knowledge is applied is always idiographic: a particular individual case comprising a
unique combination of the levels of many others relevant variables. The engineer, the physician, and the teacher
are alike in having to use art in applying nomothetic knowledge to idiographic
cases; they differ only in the amount
and strenght of the nomothetic knowledge available for their use. All must compensate for the inadequacies of
their nomothetic knowledge by the use of artistry, craftsmanship, and other
hard-to-describe procedures and processes.» (Gage, 1985, p. 8).
2- Problèmes méthodologiques.
La réalisation de travaux visant à synthétiser les résultats de
plusieurs recherches pose une série de problèmes méthodologiques qu'il convient
de souligner. Établissons d'abord les
niveaux logiques. Le premier niveau est
le plus près de la réalité de la classe; c'est celui que Walberg (1986) appelle
le niveau de la recherche primaire (Primary
Research). Celle-ci peut se définir comme étant une recherche originale qui
analyse des données brutes quantitatives ou qualitatives. Les recherches primaires peuvent couvrir un
grand éventail de variables (Brophy et Evertson, 1976). Toute recherche de ce type comporte à des
degrés divers une partie qui vise à discuter les recherches antérieures
produites sur le sujet à l'étude, mais cela n'en fait pas pour autant une
recherche de second niveau. Les
recherches de deuxième niveau consistent essentiellement et non accessoirement
à faire le tour de ce qui s'est écrit sur une question. Le deuxième niveau réfère aux synthèses de
recherches primaires, c'est-à-dire l'étude de celles qui ont été réalisées au
premier niveau. Ces synthèses peuvent être des «revues de recherche», des
«synthèses de recherche» ou encore des «méta-analyses». Ces synthèses se regroupent en trois types.
Une revue de recherche est un commentaire narratif au sujet des recherches
primaires. Habituellement la revue de
recherche décrit et critique les recherches une par une mais ne les analyse pas
quantitativement (Walberg, 1986). La synthèse de recherche applique
systématiquement des techniques quantitatives pour le résumé et l'évaluation
des recherches. Enfin, la méta-analyse,
terme introduit par G. Glass en 1976, vise à intégrer les résultats de
recherches par une analyse statistique de leurs résultats; cette approche
transforme les résultats de recherche en une grandeur commune, la grandeur de
l'effet.
Le troisième niveau réfère à la manière de mettre en commun ces
synthèses de deuxième niveau pour produire une synthèse encore plus vaste ou ce
que l'on pourrait appeler une synthèse de synthèses, autrement dit, une
méga-analyse de recherches. L'article de
Wang, Haertel et Walberg (1993) constitue un des rares exemples de ce type de
travail, aussi la littérature scientifique ne discute pas de ce type de
synthèse. Par contre les synthèses de
deuxième niveau sont largement commentées.
Examinons quelques problèmes reliés aux synthèses les plus
utilisées, celles de deuxième niveau - les synthèses de recherche, les
méta-analyses et les revues de recherche - pour ensuite discuter brièvement des
synthèses de troisième niveau.
En ce qui concerne les synthèses de recherches empiriques on ne
peut passer sous silence les remarques fort pertinentes de Dunkin et Biddle qui
ont décrit à leur sujet une série de problèmes méthodologiques (Dunkin et
Biddle, 1974, chapitre Appendix:
Procedures for Review). D'abord, et
tous ceux qui travaillent en sciences humaines le savent, la comparaison entre
les recherches produites manifeste qu'il n'y a pas ou peu de consensus sur les
termes utilisés pour exprimer une signification quelconque. Un même mot employé dans des recherches
distinctes peut avoir des significations différentes et des mots différents
peuvent référer à la même réalité. Cela
devra être pris en compte notamment dans l'analyse de recherches où des
résultats de recherches similaires seront présentés dans des termes différents. De plus, des instruments très différents
peuvent être utilisés pour étudier le même phénomène et plusieurs instruments
utilisés ne satisfont pas aux critères de fidélité et de validité requis. Des patrons de recherche (Research Design) forts différents
peuvent également être utilisés pour mesurer le même phénomène; cela ayant bien
entendu une incidence sur la validité des résultats. De nombreuses techniques
statistiques sont utilisées qui varient en étendue et en qualité. Compte tenu qu'elles sont faites pour la
plupart pour des échantillons aléatoires, les statistiques doivent être
manipulées avec soin puisque dans le champ de l'éducation, les recherches
faites sur les enseignants impliquent généralement de petits échantillons
d'enseignants et choisis de façon non aléatoire et qui, en plus, présentent
très souvent les mêmes caractéristiques contextuelles, enseignants blancs dans
des classes de banlieue. Enfin, les résultats peuvent être publiés dans toutes
sortes de revues et il y a encore peu de consensus entre les responsables de
revues sur les critères de recherche de qualité qui rendent possible ou non la
publication des recherches.
Bref, le chercheur qui produit une synthèse de recherche
quantitative mobilise sans cesse son jugement au cours de son travail de
recherche, de la sélection des études jusqu'à la présentation des
résultats. En ce qui concerne la
sélection des études, le chercheur doit décider de la qualité des recherches à
conserver; Medley (1977) avait, par exemple, décidé de ne conserver que les
recherches présentant des coefficients de corrélation au-dessus de .39. La présentation des résultats pose également
un problème considérable. Dunkin et
Biddle (1974) ont choisi de présenter des «boîtes»; Rosenshine (1971), des
tables. Dans tous les cas, le choix
n'est pas facile à faire et la décision prise a une énorme influence sur le
déroulement du travail. La présentation
des résultats a au moins autant d'importance que la sélection des études. Ces
problèmes font partie de la recherche de synthèse, par conséquent, le chercheur
devra plutôt se munir d'une grande prudence dans l'interprétation de ses
résultats et composer avec cette limite importante.
En ce qui concerne les méta-analyses, quelques remarques méritent
d'être faites en plus de celles qui valent pour les synthèses de
recherche. Cette forme de recherche est
devenue de plus en plus populaire depuis quelques années (Levin, 1986). Elle constitue en quelque sorte l'équivalent,
à un niveau logique supérieur, de la démarche processus-produit (Shulman, 1986)
et elle en présente des défauts semblables. En effet, elle est accusée d'être
a-théorique (Kerdeman et Philips, 1993) au sens où elle tente de dévoiler ce
qui marche mais sans réfléchir sur les raisons, le pourquoi, de l'efficacité
d'une conduite. De plus, les
méta-analyses présentent les difficultés de calibrer différentes recherches
selon une même unité; la grandeur de
l'effet tend à être plus importante dans des études avec moins de contrôle et,
par conséquent, les auteurs qui
recherchent le plus grand effet ne portent pas leur attention aux autres études
(Singer, 1993).
Les revues de recherche ou synthèses narratives décrivent assez en
détail diverses recherches qui ne sont pas nécessairement quantitatives et
tentent d'en faire ressortir les éléments dominants. Les articles de Rosenshine
et Stevens (1986) ou de Brophy et Good (1986) en sont des exemples. Ces derniers les évaluent comme suit «It involves more judgment and less
mathematical precision than the other approaches, but we believe that it is
better suited to the task of coming to understand the reasons for observed
process-product relationships (and especially for resolving apparent
discrepencies and explaining real discrepancies in the findings)» (Brophy et Good, 1986, p. 331).
Enfin, le troisième niveau de commentaires méthodologiques,
c'est-à-dire celui concernant la synthèse des synthèses, est très complexe non
seulement parce qu'il intègre des résultats de trois types de recherches
(revues narratives, synthèses de recherche, méta-analyses) mais aussi parce
qu'on ne retrouve pas ou peu dans la littérature d'exemples de recherches
tentant de réaliser un tel programme.
Ces recherches ont à la fois des visées descriptives et théoriques. Elles cherchent à décrire le plus fidèlement
possible les principaux résultats de synthèses de recherche; elles ne peuvent
se limiter aux seules procédures mathématiques mais doivent discuter des
résultats des diverses recherches. Mais
une méga-analyse a aussi un intérêt théorique au sens où elle vise à construire
un portrait de la réalité du savoir pédagogique et didactique de
l'enseignant. L'enseignant ainsi
construit n'existe pas à proprement parler puisqu'aucun enseignant réel ne
mobilise autant de savoirs mais il est une sorte de modèle, au sens de modèle
réduit, de ce que la recherche dit à propos des facteurs qui influencent
l'enseignement. Mais cet enseignant fictif est aussi un modèle au sens normatif
du terme parce qu'il est issu de recherches qui s'inscrivent dans un cadre
éthique particulier et ne vaut qu'à l'intérieur de ce cadre.
3- Problèmes politiques
L'année même de la parution du rapport A Nation at Risk (1983), un
groupe de doyens de plusieurs grandes universités américaines s'est formé et a
commencé à discuter de la réforme de l'enseignement aux États-Unis mais cette
fois, dans la perspective de la profession enseignante et de la formation des
maîtres. Ce collectif, qui n'a cessé de
croître depuis, s'est donné une structure formelle portant le nom de Holmes
Group en 1986 et a produit plusieurs manifestes qui
ont eu un grand retentissement (1986, 1990, 1995) dans les milieux concernés.
Leur argumentation tenait dans l'idée que, pour réformer l'éducation, il
fallait rendre plus compétents les enseignants et que cette tâche devait, entre
autres, prendre appui sur la recherche qui servirait à déterminer une base de
connaissances nécessaires pour enseigner.
Un des impacts importants du Holmes Group aura donc été de stimuler la
recherche sur la détermination d'une base de connaissances en
enseignement. Cependant, leur effort
louable comporte le danger de faire porter tout le poids des problèmes de
l'éducation sur les maîtres eux-mêmes et détourner ainsi le regard des
problèmes sociaux structurels plus fondamentaux. En effet, les problèmes éducatifs ne peuvent
être isolés du contexte social, politique, économique dans lequel ils prennent assise. Par exemple, le lien est très étroit entre le
décrochage scolaire et le milieu socio-économique. Les énergies ne peuvent donc être dévolues
seulement à doter les maîtres de nouvelles compétences, mises à jour par la
recherche, pour améliorer l'éducation; au contraire, l'action doit porter
également sur des facteurs plus profonds et insidieux. Apple (1987) souligne à juste titre ce
problème: «Thus, we cannot fully
understand why our formal institutions of education and the teachers and
administrators who work so long and hard in them are being focused on so
intently today unless we realize that economically powerful groups and the New
Right have been partly successful in refocusing attention away from the very
real problems of inequality in the economy and in political representation and
shifting most criticism to the, health, welfare, legal, and especially
educational systems.» (p.21).
Toujours selon Apple, les groupes politiques et économiques dominants
auraient ainsi réussi à «exporter» le contenu de la crise de l'éducation loin
d'eux et à en faire porter tout le poids sur les épaules de l'école et
particulièrement sur celles des maîtres. Des commentaires analogues ont été
tenus par Palincsar et McPhail (1993) au sujet de l'article de Wang, Haertel et
Walberg (1993) sur la détermination d'une base de connaissances: «Interestingly though, academic
investigators of the school crisis have tended to ignore the social problems
evident in the schools and, instead, have designed investigation that reduce
the crisis to the unitary dimension of underachievement.» (p.331).
La dimension politique des recherches en vue de la détermination
d'une base de connaissances apparaît d'une autre manière. On sait que ces recherches ont une visée
pratique au sens où elles tendent à améliorer l'éducation; leurs résultats
seront donc investis dans la pratique par des politiciens ou autres
décideurs. Or, à moins d'un coup de
force, et cela arrive souvent, semble-t-il, on ne peut appliquer sans
précaution les résultats de ces recherches à la solution de problèmes
scolaires. «Nevertheless, policies and
programs for teacher selection and certification at the local and state levels
have often taken the results of process-product research and translated them
into rather inflexible evaluative standards (Shulman, 1983). Commissions have taken research on engaged
time and prescribed longer school days or school years as a solution to low
academic achievement. Contrary to the
intentions of most leaders in the process-product program, the conception of
teaching as a precisely prescribable set of behaviors for increasing pupil gain
scores has florished among designers of some teacher evaluation and staff
development programs.» (Shulman 1986
p. 29). Pour contrer ce problème, il
faudrait suivre la proposition de Medley (1977, p. 6) qui propose le concept
intéressant de «interim findings» pour mieux faire saisir que les résultats de
recherche sont provisoires et doivent être utilisés avec prudence.
4- Problèmes pratiques en regard de la
formation.
Une des visées de la détermination d'une base de
connaissances est d'ordre pratique au sens où, entre autres, les résultats des
recherches seront intégrés dans un programme de formation. Il faut cependant
mentionner qu'un programme de formation n'est pas le résultat d'un processus
scientifique mais plutôt délibératif et politique. Construire un programme de formation implique
la projection d'un certains nombre de valeurs à privilégier qui ne sont en
aucune manière scientifiques. La
recherche peut aider à décrire et à comprendre une réalité donnée mais elle ne
peut en aucune façon déterminer les finalités à poursuivre.
La recherche sur la détermination d'une base de connaissances en
enseignement a permis de stimuler fortement les investigations au niveau de la
classe même: les résultats sont tirés d'observations de vrais enseignants dans
de vraies classes avec de vrais élèves.
À partir de ces centaines de variables du processus de l'enseignement
examinées, certains ont tenté de reconstituer le métier. «From
the hundreds of correlations, especially the significant ones, the
investigators and reviewers then synthesize the style or pattern of teaching
that seems to be associated with desirable kinds of pupil achievement and
attitude» (Gage cité par Shulman, 1986, p.12). En ce sens Gage (1978) distingue les «styles
naturels» des «styles composites». À
partir de corrélations tirées de la situation naturelle, le chercheur recrée
artificiellement une synthèse composite du métier qu'il peut ensuite faire
apprendre dans une formation. Gage (cité
par Shulman, 1986) a montré que si on fait apprendre des éléments des styles
composites à des enseignants, leurs élèves réussissent mieux que ceux du groupe
témoin. Cependant, il a constaté que les
enseignants du groupe expérimental n'ont pas toujours manifesté certains
comportements «désirables» plus que ceux du groupe témoin, de même que certains
comportements exercés ne semblaient plus entraîner la réussite des élèves. Ces
résultats indiquent que des éléments du modèle composite semblent inutiles et
que d'autres facteurs jouent. La piste
est intéressante et ces résultats doivent être expliqués par d'autres types de
recherches. Cela nous conduit à distinguer
la recherche sur l'enseignement en général, de la recherche sur l'enseignement
en vue de l'utilisation dans la formation.
Que la recherche réussisse à isoler des centaines de variables au sujet
de l'enseignement est une chose, une autre est cependant de transformer ces
résultats dans un format qui puisse être intégré dans une formation.
Références
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(1986). Handbook of Research on
Teaching. A Project of the American
Educational Research Association. Troisième édition. New York: Macmillan.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
27 août 2014
Pour réfléchir sur notre rapport à l'Autre
Ryszard Kapuściński (2014). Cet Autre. Paris : Pocket. Recueil de conférences prononcées entre
1990 et 2004. Traduit du polonais par Véronique Patte.
Ryszard Kapuściński est un intellectuel polonais né le 4 mars 1932 à Pinsk, en Pologne, mort le 23 janvier 2007 à Varsovie
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
24 août 2014
Les classiques de Calvino
Calvino,
Italo (1996). Pourquoi lire les classiques. Paris : Seuil. Recueil de textes
parus de 1954 à 1984.
Dans cet ouvrage d'un peu plus de 200 pages Italo Calvino - écrivain italien né le 15 octobre 1923 et décédé le 19 septembre 1985 - nous fait découvrir ses «classiques». Et, cela veut dire que nous sommes conviés à un voyage merveilleux.
De Xénophon et Pline (dans l'Antiquité gréco-latine) à Perec, Borges ou Hemingway en passant par Diderot, Dickens, Balzac, Flaubert, Tolstoï, Maupassant, Tchekohv, Twain, Pasternak, Queneau et j'en passe, Calvino analyse de grandes oeuvres de manière succincte mais toujours pénétrante.
Pour donner le goût de lire ou relire des classiques !
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
21 août 2014
Wilhelm Dilthey (1833-1911)
Selon ce grand penseur « comprendre/interpréter » constitue une forme de connaissance tout aussi légitime que l’explication (sciences de la nature). Les expressions de la pensée humaine - objets des sciences humaines et sociales - sont des «objectivations perceptibles». L’étude de ces expressions de la vie de l’esprit exige une méthode fondée sur la compréhension et l’interprétation. Cette méthode doit être balisée par une série de règles qui assurent d’une interprétation correcte. Ces règles constituent l’herméneutique. Les humains produisent des «actes de volonté» qu’il faut comprendre. Pour ce faire, il faut développer un mode de raisonnement qui tient compte des fins poursuivies par les acteurs. Ce mode de raisonnement est de nature différente du raisonnement causal qui a cours dans les sciences de la nature.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Mascarade
Nos élus sont pour la plupart de petits roitelets sans envergure acquis à la pensée unique et téléguidés par le grand capital. Notre démocratie est une mascarade.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
20 août 2014
Crozier et Friedberg
Dans une bonne mesure, je fais miens les postulats de l'analyse stratégique telle que
développée il y a des décennies déjà par Crozier et Friedberg (1977, collection Points 1981).
Quels sont ces postulats? On peut en dégager trois. Premièrement,
les êtres humains n'acceptent pas d'être traités comme des moyens
au service des buts des organisations. Chaque acteur individuel
possède ses propres buts et ses propres objectifs et agit en
conséquence. Deuxièmement, l'analyse doit mettre l'accent sur la
liberté et l'autonomie de l'acteur. Dans une organisation (comme
l'école par exemple) le rôle joué par l'acteur (pensons à un enseignant) est contraignant
mais cela n'empêche aucunement qu'il peut être interprété de multiples
façons. Ces interprétations possibles d'un rôle
représentent des espaces de liberté pour l'acteur. Troisièmement,
les stratégies de l'acteur sont rationnelles mais cette rationalité
est limitée et contingente. Ces trois postulats se résument donc
ainsi : l'acteur est un être partiellement libre, ayant des buts personnels et
capable d'une rationalité, bien que celle-ci soit limitée par son
inscription dans l'action.
RÉFÉRENCE :
Crozier, M., Friedberg, E. (1981). L'acteur
et le système. Paris. Seuil.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Cinq dimensions de l'insertion professionnelle en enseignement
L’insertion professionnelle est un concept polysémique et
surtout, il renvoie à des univers et à des critères variés selon
que l’on adopte une perspective économique, sociologique,
psychologique, managériale ou autre. Or, à la suite de plusieurs
mutations du marché du travail et de transformations survenues dans
le monde des professions, l’étude de l’insertion requiert plus
que jamais une dynamique appuyée sur différentes approches. De plus, il semble y avoir un certain consensus à l’effet que l’insertion professionnelle n’est
pas un événement instantané ni une simple transition d’un rôle à un autre mais plutôt un processus graduel et, à bien des égards,
multidimensionnel, qui peut
s’étendre sur plus ou moins les sept premières années de service. Le caractère multidimensionnel de ce processus se comprend de
plusieurs façons. Ainsi, par exemple, on peut dire que le débutant doit
traverser trois frontières : la frontière inclusive qui concerne
l’acquisition de la culture professionnelle et l’appartenance au
groupe ; la frontière fonctionnelle qui vise l’acquisition de
l’efficacité dans le travail et enfin, la frontière hiérarchique
qui concerne la reconnaissance professionnelle et sociale. On peut dire aussi que l’insertion
professionnelle comporte cinq dimensions interdépendantes et
complémentaires. La première dimension correspond à l’intégration en emploi et
renvoie aux conditions d’accès et aux caractéristiques des
emplois occupés. C’est la dimension économique de l’insertion
et à cet égard, les aspects tels que le délai d’attente de
l’emploi, le statut, la durée et la stabilité d’emploi ainsi
que le salaire sont pris en compte. L’accès à l’emploi est en
quelque sorte le point de départ de toute insertion professionnelle. La deuxième dimension concerne l’affectation spécifique et les
conditions de la tâche, notamment en ce qui concerne la nature, les
composantes et l’organisation de la tâche, le lien entre la tâche
spécifique et le champ particulier de formation, la stabilité de
tâche et de milieu, la charge de travail, etc. En fait, il ne suffit
pas d’avoir un emploi, encore faut-il considérer les tâches
assignées et les conditions de travail dans lesquelles les recrues
exercent leur fonction. La troisième dimension réfère à la socialisation
organisationnelle. En effet, il ne suffit pas de
considérer la prise de fonction, il faut aussi s’interroger sur le
type d’organisation et de culture dans lesquels le nouvel
enseignant est appelé à travailler et à s’intégrer. L’enseignant novice n’est pas nouveau seulement dans la
profession, il est nouveau aussi dans une organisation scolaire en
particulier, qui a ses caractéristiques, sa culture, ses valeurs,
ses règles de fonctionnement, ses attentes, etc. Il doit donc s’intégrer à son
nouveau milieu de travail, s’adapter au système existant et
acquérir les connaissances sociales et procédurales essentielles
lui permettant de se faire accepter au sein de l’organisation, d’y
assumer un rôle et d’y participer en tant que membre. Bref, suivant la perspective de la socialisation
organisationnelle, l’adhésion de l’enseignant débutant à la
culture organisationnelle de son nouveau milieu d’accueil, la
familiarisation avec ce milieu, à la fois sur le plan physique et
organisationnel, sur le plan social, et sur le plan philosophique et
politique, constituent un enjeu majeur de l’insertion
professionnelle. Mais la transition est loin d'être simple car entrer dans la carrière est un processus éminemment
social qui implique des interactions multiples et complexes entre les
nouveaux enseignants et les autres membres de l’organisation
scolaire d’accueil. À ce propos, le milieu joue un rôle capital dans la transition et dans l’acquisition du
sentiment d’accomplissement et de compétence. Bref, l’adhésion de l’enseignant débutant à la
culture organisationnelle de son nouveau milieu d’accueil,
la familiarisation avec ce milieu, à la fois sur le plan physique et
organisationnel, sur le plan social, et sur le plan philosophique et
politique, constituent un enjeu majeur de l’insertion
professionnelle. La quatrième dimension renvoie à la «professionnalité», c’est-à-dire
à l’adaptation et la maîtrise du rôle professionnel, par le
développement des savoirs et compétences spécifiques au métier.
Il s’agit, dans le cas des enseignants, du savoir « faire
la classe », de devenir efficace et efficient dans les
diverses facettes du travail. On parle donc d'un processus d’apprentissage du métier, de développement
professionnel où le débutant devient peu à peu compétent. L’acquisition des
compétences pédagogiques et didactiques apparaissent donc au cœur du
processus d’insertion professionnelle. La cinquième dimension renvoie à
la dimension personnelle et psychologique. Il faut
reconnaître que l’insertion professionnelle n’implique pas
seulement un apprentissage au plan cognitif. C’est aussi une
expérience humaine et émotionnelle qui peut être plus ou moins
stressante ce qui veut dire que la manière dont la nouvelle recrue fait
face émotionnellement à sa nouvelle situation et interprète les
événements qu’il vit est déterminante. La
dimension personnelle et psychologique réfère donc aux aspects
émotionnels et affectifs de l’insertion. Plus concrètement, l’insertion
professionnelle comporte des enjeux de gestion émotionnelle (choc de
la réalité, craintes diverses, désillusion, stress),
d’accomplissement personnel, de développement de soi, notamment en
lien avec la confiance en soi, l’estime de soi, le sentiment
d’efficacité personnelle, ses représentations du métier et son
engagement professionnel (motivations, persévérance, implications).
Références :
Portelance,
L., Martineau,
S.,
Mukamurera, J. (Dir.) (2014). Développement
et persévérance professionnels dans l’enseignement. Oui, mais
comment ? Québec :
PUQ. 242 pages.
Lacourse,
F.,
Martineau, S., Nault,
T. (Dir.) (2011). Profession
enseignante. Démarches et soutien à l’insertion professionnelle.
Anjou : CEC. 191 pages.
Portelance,
L., Mukamurera, J.,
Martineau, S., Gervais,
C. (Dir.) (2008).
L’insertion
dans le milieu scolaire : une phase cruciale du développement
professionnel de l’enseignant.
Québec : PUL. 276 pages.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
19 août 2014
Se mettre à l'écoute de l'art
L'art, le vrai, peut sauver de la bêtise si nous nous mettons à son écoute et cessons de nous écouter nous-mêmes.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
Ignorance
L'ignorance est moins un manque qu'un trop plein de certitudes.
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Contrôler
Tout calculer, tout maîtriser pour diriger un monde d'esclaves.
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La marche vers un monde meilleur ?
Nous nous complaisons dans la médiocrité, nous tournons le dos à tout ce qui est vraiment grand et nous applaudissons aux niaiseries des bouffons qui nous font oublier la cruauté de notre monde.
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La toute-puissante vie
La vie réussit toujours à déjouer ceux qui prétendent la dominer.
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Vous avez dit compétences ?
Le
discours sur la notion de compétence s’impose aujourd’hui dans
de nombreuses sphères de l’activité humaine (Boutin, 2004).
D’abord employée par les psychologues pour repérer les
caractéristiques qui influencent la performance au travail, l’essor
de cette notion est attribuable aux mutations qui se sont produites
au sein des organisations. Celles-ci ont progressivement révisé la
référence faite aux qualifications des travailleurs pour se tourner
plutôt vers les capacités qu’ils doivent chercher à acquérir, à
diversifier, à approfondir et à démontrer en vue d’accroître
leur employabilité (Coulet, 2011) dans un marché du travail de
plus en plus complexe et qui exige simultanément performance et
flexibilité (Hirt, 2009).
Plusieurs définitions de la notion de compétence coexistent et elles sont souvent assez différentes les unes des
autres. Cela fait en sorte
que sa signification demeure relativement floue (Boutin, 2004; Brahimi, Farley et Joubert, 2011; Coulet, 2011; Hirt, 2009; Westera, 2001).
Des questions se posent alors :
Doit-on en parler au pluriel ou au singulier?
Faut-il en privilégier une acception
plutôt cognitive, sociale ou encore mixte?
Doit-on considérer la (les) compétence (s) comme une (des) disposition (s) naturelle (s) ou comme une (des) construction (s) résultant
d’un processus formation et de l’expérience?
Les compétences sont-elles individuelles ou distribuées?
Est-ce un produit observable, une
performance, ou y accède-t-on par le biais d’une série
d’inférences?
Les compétences sont-elles générales ou situées?
La
compétence ne se manifeste-t-elle qu’en situation inédite ou
l’action routière est-elle, elle aussi, une action compétente
mais fortement intériorisée, incorporée?
Autant de questions qui restent encore sans réponses vraiment satisfaisantes.
Au cours des 15 dernières années, le
développement de compétences est devenu, ou plutôt, redevenu après
la vague de la competency-based
education des
années 1960 à 1980 reposant sur le béhaviorisme, un enjeu central de l’enseignement et de
l’apprentissage à l’école (Tardif, 2004;
Tremblay, 2008; Westera, 2001).
Ce retour des compétences a de multiples origines: le monde de l’entreprise bien
entendu et celui de la formation professionnelle, la crise de
confiance face à la valeur des services éducatifs dispensés à
l’école (Desbiens, 2003; Hirt, 2008), une critique de
l’approche par objectifs (Brahimi, et al., 2011), mais aussi l’influence montante du
cognitivisme et de la conviction que l’accumulation d’un vaste
répertoire de connaissances n’est pas une garantie de
réinvestissement effectif dans une action compétente
contextualisée.
Choisissant de recentrer l’attention sur l’élève et son
apprentissage plutôt que sur l’enseignant et son enseignement,
opposant une certaine idée « traditionnelle » de la
pédagogie à une « nouvelle » pédagogie et confrontant
une approche où les savoirs demeureraient (supposément) inertes à une autre où ils seraient convoqués au travers de situations dites signifiantes, ce qu’il
convient d’appeler l’approche par compétence(s) (APC) a mis de
l’avant l’idée que l’acte d’apprendre « (…) est
plus une construction qu’une transmission, nécessite des
interactions humaines, est un acte social qui s’inscrit dans un
contexte, inspire la décision et l’action, est porté par un
projet qui donne du sens » Mérenne-Shoumaker (2006, p. 14).
Au
risque d’amener nombre d’enseignants à penser que ce qu’ils
faisaient depuis tant d’années n’était pas adéquat, l’APC a
provoqué et provoque encore d’intenses réflexions sur les
pratiques d’enseignement, la sélection des savoirs dits
essentiels, la définition de profils de sortie et les conditions à
mettre en place pour conduire les élèves et les étudiants au
succès.
Le débat continue et ne semble pas prêt de s’apaiser.
Quelques références
Boutin
G. (2004). L’approche par compétences en éducation : un
amalgame paradigmatique. Connexions,
81(1),
25-41.
Brahimi,
C., Farley, C. et Joubert, P. (2011). L’approche
par compétences. Un levier de changement des pratiques en santé
publique au Québec.
Québec : Institut national de santé public du Québec.
Coulet,
J-C. (2011). La notion de compétence : un modèle pour
décrire, évaluer et développer les compétences. Le
travail humain,
74(1),
1-30.
Desbiens,
J-F. (2003). Mutations des contextes socioéducatifs et
socioprofessionnels et développement des savoirs professionnels en
enseignement de l’éducation physique. In
C. Borges et J-F. Desbiens (dirs), Savoir,
former et intervenir dans une éducation physique en changement
(pp. 91-120). Sherbrooke : Éditions du CRP.
Hirt,
N. (2009). L’approche par compétences : une mystification
pédagogique. L’école
démocratique,
39,
septembre, 1-34.
Mérenne-Shoumaker
(2006). Développer une approche par compétences dans la formation
universitaire. Bilan de trois expériences en géographie urbaine et
économique. Bulletin
de la Société géographique de Liège,
48,
7-17.
Tremblay,
R.-R. (2008). Beyond the opposition between knowledge and
competencies. Reflections on the competency-based approach and
general education. Pédagogie
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Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
18 août 2014
Vision de l'insertion professionnelle par des futurs enseignants
L’insertion professionnelle est
définie par certains spécialistes selon différents paramètres,
dont la durée et le statut d’emploi. Nous préférons l’aborder
comme un processus situé sur le continuum du développement
professionnel de l’enseignant, en continuité avec la formation
initiale, et donc faisant place à un cheminement en rapport avec le
développement des compétences professionnelles et la construction
identitaire. Le déroulement de ce processus peut être caractérisé
par des conditions facilitantes et des obstacles. Il peut aussi être
influencé par l’idée que s’en font les futurs enseignants. Il
est en effet reconnu que les représentations préalables d’une
situation conditionnent les actions posées effectivement dans la
situation. En d’autres mots, les images mentales, qui reflètent
les théories personnelles, les valeurs et les croyances, sont liées
aux expériences concrètes. En considération de cette affirmation,
nous avons étudié les représentations des futurs enseignants du
préscolaire et primaire quant à leur insertion professionnelle.
Nous avons voulu connaître l’idée qu’ils se font de leur
intégration de même que de leur plan de carrière.
Au cours des années 2004-2005,
2005-2006 et 2006-2007, mes collègues Liliane Portelance, Annie Presseau et moi (professeurs à l'Université du Québec à Trois-Rivières) avons distribué un questionnaire aux
finissants du baccalauréat en éducation préscolaire et
enseignement primaire (BEPEP) de l’Université du Québec à
Trois-Rivières. Au total, 202 d’entre eux y ont répondu, soit
environ 60% de l’ensemble, la participation augmentant d’une
année à l’autre. Mentionnons qu’en concordance avec la
composition de la population étudiante du BEPEP, la presque totalité
des participants est de sexe féminin. Nous subdivisons en quatre
sections l’essentiel de leurs réponses: les attentes par rapport à
l’intégration professionnelle, la collaboration au sein du milieu
d’accueil, la trajectoire professionnelle prévue et les obstacles
à une insertion réussie.
Les étudiants ont d’abord indiqué
les attentes probables du milieu d’accueil à leur égard. Ils
croient que la direction d’établissement souhaite que les nouveaux
enseignants soient compétents et agissent comme des professionnels,
s’impliquent dans différents comités et activités, remplissent
leur tâche de manière efficace et prennent des initiatives. Il
serait également attendu d’eux qu’ils partagent leurs
connaissances et soient des agents de changement, sans toutefois
imposer leurs idées, en adoptant une attitude de respect à l’égard
du milieu d’accueil, en faisant preuve d’une bonne capacité
d’adaptation et d’une aptitude à collaborer. Les finissants
supposent que, de leur côté, les enseignants expérimentés
aimeraient que leurs collègues débutants prennent leur place de
manière mesurée, expriment des idées nouvelles, soient prêts à
s’impliquer dans le milieu et à collaborer avec ouverture
d’esprit.
Parmi les attentes probables du milieu
d’accueil, certaines concernent les compétences professionnelles.
Les finissants croient que les plus susceptibles d’être
recherchées sont les compétences en matière de collaboration pour
l’atteinte des objectifs de l’école et en matière d’éthique
et de responsabilité. Deux autres compétences sont mentionnées par
un grand nombre, l’une ayant trait au bon fonctionnement de la
classe et l’autre à la concertation au sein d’une équipe
pédagogique.
Les étudiants ont également indiqué
leurs propres attentes à l’égard des enseignants et de
l’équipe-école du milieu d’accueil. De la part des enseignants
expérimentés, ils aimeraient recevoir un accueil chaleureux. Ils
veulent également pouvoir compter sur du soutien et de
l’encadrement, tout autant que sur la reconnaissance de leur
compétence professionnelle (« être considéré comme un pair » ,
« faire reconnaître ses compétences », « être intégré comme
un membre à part entière », « être admis comme un égal »). De
la part de toute l’équipe-école, les futurs enseignants désirent
être traités avec respect et ouverture d’esprit dans un climat de
collaboration. Il serait pertinent de vérifier si toutes ces
attentes sont comblées en cours de processus d’insertion
professionnelle.
Les étudiants conçoivent la
collaboration en milieu scolaire comme un partage et un échange. Il
s’agit d’échange d’idées, de savoirs, de valeurs,
d’expériences, de méthodes de travail, de trucs, de conseils, de
nouveautés, de documentation, d’activités. Il est également
question du partage des tâches, de l’élaboration conjointe de
projets, du jumelage de classes. Cette collaboration nécessite
l’accompagnement, les conseils, les rétroactions et
l’encouragement des enseignants expérimentés en faveur des
débutants. Un répondant écrit : «Je pense qu’en nous
observant ils peuvent voir nos faiblesses et en nous questionnant
nous amener à les trouver. Aussi ils peuvent nous donner des
conseils et nous «pister» pour nos cours.» L’expérience
professionnelle de l’enseignant expérimenté semble très
respectée : «L’expert apporte du soutien, et son expérience
est mise à profit par le novice ». La collaboration se manifeste
aussi concrètement par l’accueil réservé aux enseignants
débutants et l’aide à leur intégration dans l’école. Elle
consiste aussi à leur offrir du soutien.
En complémentarité, les futurs
enseignants signalent qu’ils devront s’adapter aux particularités
du milieu d’accueil, faire preuve d’une certaine assurance et de
confiance en soi, tout en ne craignant pas de poser des questions.
Selon l’un des répondants, « il faut se faire discret tout en
prouvant son professionnalisme ». Les finissants ne mentionnent pas
qu’il leur sera fort utile de confier leurs difficultés à des
enseignants expérimentés, probablement parce qu’ils voudront
éviter de se faire juger négativement. Toutefois et avant tout, le
rôle de l’enseignant débutant, dans une atmosphère de
collaboration, consisterait à faire profiter le milieu d’idées
nouvelles, de méthodes d’enseignement différentes, d’outils
didactiques nouveaux et de savoirs récents. Notons que les étudiants
croient avoir une meilleure connaissance du renouveau pédagogique
que leurs aînés. De plus, il est clair pour eux que la
collaboration n’est pas possible si l’ouverture d’esprit, le
respect, l’écoute et la disponibilité sont manquants. De leur
côté, ils se montreront ouverts aux personnes et aux idées, aux
suggestions et aux critiques et s’impliqueront en classe et dans
les diverses activités de l’école, tout en respectant
l’équipe-école et en se conformant aux règles établies
En définitive, le partage et les échanges
au sein du milieu d’accueil feront appel à la nouveauté des «
idées d’activités et de gestion de classe », au dynamisme, à
l’enthousiasme, à la créativité, à « la fraîcheur » et « la
jeunesse ». Avec leur « connaissance des théories récentes » et
du programme de formation des élèves, ils proposeront de l’aide
aux autres enseignants, feront preuve de leur capacité d’adaptation
et, pour bien s’intégrer, prendront des initiatives. Certains
n’oublient pas qu’il leur faudra « se faire discret tout en
montrant son professionnalisme », en d’autres termes « suivre
l’expert tout en prenant sa place ».
Plus de quatre répondants sur cinq ont déjà fait de la suppléance dans
les écoles, ce qui leur permet d’avoir une bonne connaissance des
embûches qu’ils pourront rencontrer en début de carrière. Par
exemple, la majorité prévoit que l’obtention d’une permanence
d’emploi pourra prendre entre quatre et six ans. Malgré cela, leur
rêve d’accéder à la profession enseignante est soutenu par des
idées favorables, telles le plaisir d’enseigner et la valorisation
qu’ils accordent à la profession. Ainsi, il est question du «
goût d’être un modèle, de bâtir un avenir solide pour les
citoyens de demain et de participer à leur développement et au
développement de la société ». Plus de la moitié des répondants
visent à faire une longue carrière dans l’enseignement ou à «
enseigner le plus longtemps possible ». Les principaux objectifs de
carrière mentionnés concernent le développement professionnel et
la formation continue (« toujours m’améliorer et relever de
beaux défis »), l’atteinte d’une stabilité
professionnelle dans l’enseignement ou dans le domaine de
l’éducation, la relation pédagogique avec les élèves (« donner
le goût d’apprendre aux élèves ») et à la qualité de
leurs apprentissages.
Les finissants considèrent qu’ils
ont atteint un niveau élevé dans le développement de la plupart
des compétences professionnelles attendues d’un enseignant, en
particulier celles qui se rapportent à la conception et le pilotage
des situations d’enseignement-apprentissage, le fonctionnement d’un
groupe-classe, la collaboration, l’engagement dans le développement
professionnel et l’éthique professionnelle. Ils expriment, somme
tout, leur appréciation globalement positive de leur formation.
Toutefois, ils se considèrent moins compétents quant à
l’adaptation de leurs interventions aux besoins particuliers des
élèves en difficulté et la maîtrise orale et écrite de la langue
française.
Quant aux obstacles à affronter, les
futurs enseignants semblent en avoir une idée plutôt réaliste. Ils
croient qu’ils pourraient faire face à un manque de ressources
pour les soutenir dans leurs efforts (« manque d’accueil et de
soutien », « jugement négatif des autres ») et se faire confier
une très lourde tâche. Des problèmes de santé et l’épuisement
professionnel de même que la perte de la motivation à enseigner
sont évoqués comme des effets possibles de ces obstacles. Ces
difficultés personnelles pourraient éventuellement les inciter à
abandonner la profession. La précarité d’emploi les préoccupe
aussi. Elle pourrait également avoir comme conséquence un
changement de carrière.
Par rapport à la lourdeur de la
tâche, ils précisent leur anticipation. L’enseignement
à une clientèle pour laquelle ils ne sont pas préparés (autre
ordre d’enseignement, élèves en difficultés, classes
d’adaptation scolaire) et l’enseignement d’une discipline qui
ne fait pas partie de leur profil de formation sont considérés
comme des facteurs qui alourdiraient leur tâche de manière
démesurée.
Quant au renouveau pédagogique, on peut se demander s'il est vu comme un obstacle à la persévérance dans la profession. En fait, nos réponses indiquent qu'il est plutôt estimé comme un avantage.
Les étudiants soulignent en majorité que leur formation les a bien
préparés sur ce plan (« les novices ont une formation plus récente
et plus en lien avec la réforme … ils sont déjà dans le courant
»), que leurs connaissances à propos des nouvelles méthodes et
stratégies d’enseignement sont nombreuses et que les enseignants
expérimentés auront besoin d’eux pour mieux comprendre la réforme
(« le débutant est mieux équipé »). De plus, étant d’avis que
la collaboration et le partage sont devenus nécessaires avec la
réforme, ils espèrent se tailler facilement une place dans le
milieu.
En conclusion, les représentations
des futurs enseignants de l’éducation préscolaire et de
l’enseignement primaire quant à leur insertion professionnelle
montrent qu’ils anticipent à la fois avec optimisme et réalisme
leurs premières expériences d’enseignants débutants. La
conception de l’insertion professionnelle qui se dégage de leurs
réponses correspond à l’idée d’un cheminement qui commence
avec la formation initiale et se poursuit au début de la carrière
et au cours des années subséquentes. En effet, les finissants
s’appuient sur leur formation au baccalauréat pour se projeter
dans un avenir immédiat et ils se fixent comme objectif de prolonger
leur développement professionnel par la formation continue. Si les
liens entre représentations et expériences concrètes sont aussi
étroits que l’affirment les spécialistes, les nouveaux
enseignants formeront une relève responsable et engagée.
Références
Portelance, L.,
Martineau, S. et Presseau, A. (2008). Les futurs enseignants
envisagent-ils de travailler en collaboration avec les acteurs du
milieu scolaire ? In
L. Portelance, J. Mukamurera, S. Martineau, S. et Gervais, C. (dir.),
S’insérer
dans le milieu scolaire : phase cruciale du développement
professionnel des enseignants,
Sainte-Foy, PUL, 125-143.
Teulier-Bourgine R. (1997). Les
représentations : médiations de l'action stratégique, dans M. J.
Avenier (coordination), La stratégie "chemin faisant",
Paris, Economica, p. 95-135.
Professeur titulaire au département des sciences de l'éducation de l'Université du Québec à Trois-Rivières
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