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30 décembre 2010

En suivant la pensée du philosophe Charles Taylor

Taylor distingue certains concepts essentiels à son propos.

Cadre de référence : Il s'agit d'un ensemble de distinctions qualitatives déterminantes.

Évaluation forte : Cette idée renvoie au fait qu'il existe des fins ou des biens plus dignes ou plus désirables que les autres, au delà des biens et des fins ordinaires, qui ne dépendent pas de nos inclinations personnelles.

Identité : Ce qui permet de définir ce qui compte ou non pour moi.

Hyperbiens : «[...] des biens qui ne sont pas seulement incomparablement plus importants que d'autres, mais encore qui déterminent le point de vue à partir duquel ces biens doivent être pesés, jugés et faire l'objet d'une décision» (1998, p. 93).

Biens constitutifs : Ils sont une source morale pour nous, ce quelque chose dont l'amour que nous leur vouons nous permet de faire le Bien et d'être Bon. Par exemple, chez le philosophe allemand Emmanuel Kant la rationalité est le Bien constitutif.

Taylor soutient non seulement qu'on ne peut se passer de cadres de référence mais aussi qu'on ne peut pas être un moi uniquement pour soi-même car le moi existe nécessairement dans un réseau d'interlocutions.

Ainsi, l'être en devenir que je suis se demande toujours non seulement qui il est mais aussi où il va.

Par conséquent, on se comprend toujours d'une manière «narrative» :

[...] «donner un sens à mon action présente exige une compréhension narrative de ma vie, un sens de ce que je suis devenu, que seul un récit peut conférer» (1998, p. 73).

Plus loin, il poursuit : «Je ne peux avoir d'intelligence du lieu où je me trouve ou de ce que je suis, [...] sans comprendre comment je suis arrivé là ou comment je suis devenu cela» (1998, p. 75).

La connaissance de soi inclut ainsi le récit. On comprendra alors que donner du sens est une obligation pour l'Homme et non pas une activité superflue ou un luxe. C'est par la forme narrative que nous concevons nos vies.

Référence : Taylor, Charles (1998). Les sources du moi. Montréal : Boréal.

Apprendre à classer le monde : en suivant Bourdieu

Pour le grand sociologue Pierre Bourdieu la culture c’est essentiellement la capacité à classer c’est à dire à faire des différences, à éviter les mélanges, bref, à distinguer. Ainsi, apprendre sera dans ce cas le processus d’acquisition de nouvelles compétences à distinguer. De ce point de vue, l’enseignement a pour mandat de transmettre des savoirs et des compétences pour distinguer. L’école devient par le fait même le lieu où on apprend à classer le monde. En outre, si une culture est une manière particulière de classer le monde, chaque culture peut donc être définie à partir des classements qu’elle effectue. C’est pourquoi, connaître une culture étrangère passera notamment par la connaissance des modes de classement de cette culture.

RÉFÉRENCE :
Bourdieu, Pierre, (1979). La distinction. Critique sociale du jugement. Paris : Minuit.

Un individu incertain

L’individu contemporain semble confronté à un double problème de distance :
face à lui-même et à son intériorité;
face à autrui et aux relations interpersonnelles.

L’individu aurait alors de plus en plus de difficulté à se situer, à trouver la bonne distance à l’égard de lui-même et à l’égard des autres.

Cela s’expliquerait notamment par la pression de plus en plus grande à la réussite, à la performance, au bonheur et également par la perte des repères tant traditionnels que familiaux ou culturels.

RÉFÉRENCE : ALAIN EHRENBERG (1995). L’INDIVIDU INCERTAIN. PARIS : CALMANN-LÉVY

Sur les théories du handicap socioculturel en contexte scolaire

Selon le chercheur John Ogbu (1978), il y aurait essentiellement trois principales manières de théoriser le handicap socioculturel :
1) la théorie de la «déprivation»...
Ici le handicap est ce qui manque à l'enfant ou à l'adolescent pour réussir sur le plan scolaire.
2) la théorie du conflit culturel...
Ici le handicap est essentiellement le désavantage que subit un élève lorsque sa culture familiale ne s'accorde pas à celle supposée nécessaire pour réussir à l'école.
3) la théorie de la déficience institutionnelle...
Ici le handicap est un désavantage produit par l'institution scolaire dans sa façon de traiter l'élève qui provient d'un milieu populaire ou d'une culture différente.

Référence :
John Ogbu (1978). Minority, Education and Caste. New York/London : Academic Press.

Propos à méditer sur la production de la connaissance sociologique

Le célèbre sociologue Georges Gusdorf mettait en évidence deux problèmes récurrents dans les sciences humaines et sociales :

1) Nombre de théoriciens (des essayistes de style philosophique) pensent trop souvent dans le vide sans lien avec la réalité sociale, culturelle et historique.

2) Les scientifiques, quant à eux, ne pensent pas, trop accaparés par leurs données à traiter, ils ne réfléchissent donc plus.

Les uns comme les autres, selon lui, nuisent à notre compréhension de l’humain.

Référence :
Gusdorf, Georges (1974). Introduction aux sciences humaines. Essai critique sur leurs origines et leur développement. Paris : Ophrys.

Quelques remarques sur l'oeuvre d'Alfred Schütz

Le concept fondamental dans la pensée du sociologue d'origine allemande Alfred Schütz est celui de «stock de connaissances disponibles». Ainsi, on peut dire que sa sociologie phénoménologique est une sociologie de la connaissance.

Selon Schütz, l’individu trouve dans la vie de tous les jours un stock de connaissances disponibles qui lui sert de schème d’interprétation de ses diverses expériences passées ou présentes. Le stock de connaissances disponibles détermine également les anticipations de l’individu sur les événements à venir.

Schütz tire quelques propositions de ce qui précède :
1) l’individu est tributaire des autres pour son information ;
2) l’individu dépend de l’information pour interpréter ;
3) l’individu interprète l’univers qui l’entoure à partir de l’information qui lui a été transmise par les autres ;
4) l’individu interprète le monde au moyen d’une information socialement déterminée ;
5) l’individu interprète le monde en ayant recourt à une information incomplète.

Tels sont certains des éléments primordiaux de la pensée de ce grand sociologue.

Référence : Alfred Schütz (1987). Le chercheur et le quotidien. Paris. Méridiens Klincksieck.

L'intrigue chez Paul Ricoeur

Cette courte réflexion se base sur les travaux du philosophe français Paul Ricoeur.

Ce dernier situe l’herméneutique par rapport à la question du temps.

Le temps échappe toujours à toutes les tentatives pour le conceptualiser.

On ne peut conceptualiser le temps, il fuit, il s’échappe sans arrêt.

Alors, comment rendre le temps qui passe cohérent ?

Comment éviter de se sentir noyer dans le flot des événements sans sens ?

Comment donner sens au temps ?

L’auteur répond : par l’intrigue !

Une intrigue c’est ce qui permet de transformer le flots des événements multiples en une suite cohérente de faits.

L’intrigue c’est la mise en récit de soi dans le temps, c’est rendre le temps intelligible, c’est identifier un départ, un développement, une fin au récit.

Chaque étape du déroulement de l’intrigue devient un élément qui participe du sens du récit et conduit d’une manière cohérente à la fin.

Si on suit la pensée de Ricoeur, on en arrive à dire que le sens d’une action n’est pas un donné immédiat mais un construit a posteriori. Dans ce cas, comprendre une action c’est nécessairement l’interpréter.

Référence : Ricoeur, Paul (1986). Du contexte à l’action. Paris : Seuil.

Un peu de l'esprit de la Renaissance

La Renaissance a été un moment important de l'histoire de l'Occident. Un moment de rupture par rapport au Moyen âge, rupture réalisée à la fois en tendant la main à l'antiquité et en inventant la science moderne. L'esprit de la renaissance peut se résumer en quelques éléments centraux :
Si l'accès à la connaissance de l'univers se fait par la science, l’accès de l’homme à lui-même se fait par un autre truchement. Comme l'homme ne peut se connaître spontanément, il accède à lui-même en faisant un détour. Ce détour passe par les signes de l’humanité. Ces signes de l’humanité se trouvent déposés dans des œuvres de culture. C’est pourquoi, l’accès de l’homme à lui-même nécessite un regard vers l'arrière. Qu'est-ce qu'on y trouve ? La tradition !
Celle-ci n’est pas une vieille chose sans valeur mais ce qui me permet de me dire au présent avec lucidité. La tradition ne doit pas être sclérose de la pensée mais impulsion vers l'avant.

Théorie de la structuration de Giddens

Quelques éléments importants de la théorie de la structuration du sociologue britannique Anthony Giddens.

Dualité du structurel : Il est à la fois habilitant et contraignant.

En Sciences Humaines et Sociales (SHS) il ne peut y avoir de causalité mécanique.

Il ne peut y avoir de déterminisme.

Il ne peut y avoir de lois universelles.

Dans la compréhension de la société, le sociologue plaide pour l’unité du sociologique, de l’historique et du géographique.

La modernité : Elle a un caractère multidimensionnel. Elle se caractérise par la réflexivité. Elle possède les attributs suivants : capitalisme; industrialisme, pouvoir administratif, contrôle des moyens de violence.

Théorie du social : Elle est plus englobante que la théorie sociologique car elle comprend les enjeux de toutes les sciences sociales.

Orthodoxie des SH : naturalisme, fonctionnalisme, objectivisme.

Réflexivité : les acteurs savent ce qu’ils font quand ils le font; cette connaissance est en partie tacite et pas entièrement discursive. Elle est plus qu’une simple conscience de soi, elle est la manière dont l’humain contrôle le flot continu de la vie sociale.

Routinisation : ce processus est essentiel «aux mécanismes psychologiques qui assurent le maintien d’un sentiment de confiance, une sécurité ontologique dans les activités quotidiennes de la vie sociale» (p. 33).

Régionalisation : «Un lieu est plus qu’un espace circonscrit, plus qu’une place, c’est un cadre d’interaction» (p. 35).

Action : avant de renvoyer à une intention, il ne faut pas oublier que l’action renvoie à une capacité d’agir.

Deux dimensions des règles : 1- sanctions; 2- constitution du sens.

Référence :

Giddens, A. (2005). La constitution de la société. Paris : PUF. Quadrige.

À propos de Jerome Bruner

Deux aspects de l'individualité qui peuvent être vus comme étant universels :

- aptitude à agir;

- l'évaluation.

Ce qui fait dire à Bruner que l'efficacité-active et l'auto-évaluation font l'estime de soi.

Trois antinomies en éducation : 1- la réalisation de soi opposée à la préservation de la culture; 2- démarche mettant au centre le talent inné opposée à celle qui considère que ce sont les outils qui priment; 3- particularisme opposé à universalisme.

Selon Bruner, accroître notre conscience, donner plus de sens au monde, passe par la mise en récit de l'expérience. En retour, la mise en récit permet une relecture de l'expérience qui en accroît le sens. On donne sens au monde à partir d'une grille mouvante (changeante) faite de notions pré-établies. Nous mettons le monde en récit afin de le partager. Nous le partageons afin de lui donner un sens. On construit un monde dans son esprit (signification) et on partage ce monde avec autrui (transaction). En quelque sorte, l'esprit crée la culture qui crée l'esprit dans un mouvement dialectique. La culture n'est donc pas quelque chose qui s'ajoute à l'esprit mais ce qui le constitue, le rend «humainement opérant». À travers le langage, nous exprimons et ressentons un «réseau d'attentes mutuelles» où vit, se reconstruit, se perpétue, se transforme la culture.

Quelques citations de Bruner (2005) :

«J'ai fait l'hypothèse que c'est grâce au récit que nous parvenons à créer et recréer notre personnalité, que le Moi est le résultat de nos récits et non une sorte d'essence que nous devrions découvrir en explorant les profondeurs de la subjectivité». (p. 104)

«Nos histoires font en fait mieux que raconter : elles imposent leur structure, leur réalité contraignante à ce que nous vivons. Elles nous imposent même une attitude philosophique». (p. 109).

«Concevoir une histoire, c'est le moyen dont nous disposons pour affronter les surprises, les hasards de la condition humaine, mais aussi pour remédier à la prise insuffisante que nous avons sur cette condition». (p. 110)

«Nos relations sont constitutives de nos identités, mais nous serons toujours quelque chose de plus : nous-mêmes ! Et cette identité-là, unique, nous vient en grande partie des histoires que nous nous racontons à nous-mêmes pour rassembler tous ces fragments épars». (p. 120)

Références :

Bruner, J. (1996). L'éducation, entrée dans la culture. Les problèmes de l'école à la lumière de la psychologie culturelle. Paris : Retz.

Bruner, J. (2005). Pourquoi nous racontons-nous des histoires. Le récit au fondement de la culture et de l'identité individuelle. Paris : Pocket.

Quelques notes sur Edgar Morin

Plaide pour une pensée ouverte au harard, à la récursivité, à la multiréférentialité contre une pensée binaire, réductionniste, positiviste, scientiste. Il se définit comme un «constructiviste» et réfute ce qu'il appelle le paradigem de la simplification. La complexité est associéé chez lui au hasard, au «bruit», à la rétroaction, à l'auto-organisation, à ce qu'il nomme «Unitas multiplex».

Les thèses de Morin s'alimentent à l'aune de :

- la théorie systémique;

- la théorie de l'information;

- la cybernétique.

Il n'adopte pas un position naïve vis à vis de ces trois courants mais une position critique qui en fait ressortir les lacunes, les manques, les apories. Ainsi, pour chaque courant, il reconnaît leurs limite,leurs, possibles dérives pouvant nuire à une pensée de la complexité.

La notion de complexité peut être liée - dans une certaine mesure - à la dialectique en philosophie et à la réflexivité en sociologie (au sens de Giddens par exemple).

Sur le plan épistémologique la pensée complexe implique d'accepter l'imprécision phénomémale et conceptuelle. Chez Morin, on ne peut ainsi dissocier le sujet de l'objet, l'observateur de la chose observée. En fait, il souhaite qu'en matière de pensée, de science, de réflexion, nous brisions les systèmes clos sur eux-mêmes.

Un premier «désenclavage» doit, selon lui, venir des disciplines elles-mêmes. Morin en appelle en effet de la transdisciplinarité. Ses thèses aboutissent en quelque sorte à une posture éthique pour la science : assumer sa nécessaire modestie devant la complexité du monde et des phénomènes.

Pour ce faire, la Raison - outil du savant et du philosophe - doit travailler à sa propre auto-critique. Morin dira que la rationalité est dialogue (donc ouverture) pendant que la rationalisation (terme péjoratif pour lui) est enfermement. La rationalisation veut selon lui enfermer la réalité dans un système totalement cohérent où le hasard, le «bruit», l'indécidable n'ont pas de place. En ce sens, elle est ennemie de la pensée complexe.

Pour ceux qui veulent se familiariser avec la pensée d' Edgar Morin, je recommande la lecture de :

Introduction à la pensée complexe. Paris, ESF, 1990.

Brèves remarques sur l'éducation

Les technologies de l'information ont déchargé l'individu de la nécessité d'une formation de type «Bildung».

Centrés sur le présent, nous nous passons des grands du passé qui ne représentent plus des modèles, des maîtres.

Comprendre, maintenant, ce n'est plus interpréter le monde à l'aide de ceux qui nous ont précédés - tout en dépassant leurs idées - mais simplement «surfer» sur l'information, sélectionner «ce qui fait notre affaire», bref, cliquer sur l'hyperlien utile.

Apprendre et comprendre ne signifient plus méditer, séjourner longuement en compagnie des grands mais simplement «performer» dans un logiciel, visiter un site.

L'individu est alors dispensé de toute formation en profondeur parce qu'il peut télécharger des formations pré-formatées déjà toutes prêtes; seule une formation à une visée utilitariste est vue comme pertinente.

Cette nouvelle manière de s'éduquer s'accompagne d'un nouvel ethos social. Le passé est évacué. Tout peut s'inventer sans égard aux pesanteurs de l'histoire (pesanteurs vues uniquement sous l'angle négatif). L'éphémère est la norme. Un monde d'épisodes successifs sans fin ni véritable finalité se met en place et se voit valorisé. Ajustements continuels au présent, réactivité devenue mode d'être privilégié.

Un nouveau monde naît sous nos yeux. Il émerge à une vitesse grand V. Mais, on ne peut dire à l'heure actuelle s'il annonce une ère de progrès pour l'Humanité (comme ce fut le cas de la Renaissance) ou s'il signifie une entrée dans un nouveau type de barbarie.

Histoire à suivre...

Quelques propos sur l'éthique

Dans tout éthique, la tradition comporte une grande importance car en la matière, notre réflexion s'appuie sur une culture.
Qu'elle soit collective ou personnelle, notre éthique est une reconnaissance que l'on appartient à une tradition car on ne pense aucun problème éthique en dehors d'une tradition de pensée (même si c'est pour s'en détacher).
Si en matière d'éthique il s'avère capital d'être à la fois congruent et authentique, cela ne saurait suffire. Il nous faut aussi la volonté.
Dit autrement, en matière d'éthique, savoir ne signifie pas savoir agir (savoir théorique) ou pouvoir agir (compétence). L'essentiel est dans la volonté.
Le savoir éthique n'est pas un savoir théorique non plus qu'un savoir faire. Il est engagement.
La notion de Phronèsis développée par Aristote rend bien cela.
La Phronèsis est inséparable de l'action, elle n'est donc pas théorie, encore moins instinct ou doxa. La Phronèsis - le savoir éthique - est essentiellement mise en discussion continuelle de l'action.
Ainsi, le savoir éthique n'est pas un savoir technique (il ne peut donc être une compétence).
Le savoir éthique est le fruit d'une éducation, d'une formation (Bildung), d'une expérience.
Il est le savoir en jeu dans la compréhension de soi.

Sur l'argumentation

Savoir argumenter est un art nécessaire en démocratie. Voici quelques principes à suivre.

Démarche en cinq étapes :
1- Identifier une question qui fait débat.

2- Formuler sa propre opinion sur cette question.

3- Dégager des arguments à la défense de son opinion.

4- Choisir un modèle d'organisation des arguments.

5- Choisir le ton approprié à l'auditoire et au contexte.

Typologie des arguments :

1- La référence aux faits.

2- L'appel aux résultats de recherches.

3- L'appel à l'autorité.

4- L'appel aux sentiments.

5- L'appel aux valeurs.

6- Le recours à l'hypothèse du lien causal.

7- L'analogie.

8- L'appel à la tradition.

Deux types de ton à adopter en argumentation :

1- Le ton neutre où l'objectivité du traitement de la question est de mise.

2- Le ton engagé où l'on peut employer l'ironie, avoir recours aux émotions, se faire polémiste.

Trois formes d'argumentation :

1- La démonstration

2- La délibération

3- La réfutation

Structures des trois formes d'argumentation :

1- Démonstration :

- Énoncer l'opinion soutenue; présenter les arguments; en conclusion réaffirmer l'opinion de départ.

2- Délibération :

- Présenter une opinion (thèse); présenter l'opinion inverse (antithèse); réaliser une synthèse qui dépasse les deux opinions précédentes.

3- Réfutation

- Présenter l'opinion adverse de la sienne; réfuter point par point les arguments de cette opinion; en conclusion énoncer son opinion en insistant sur sa valeur par rapport à l'opinion réfutée.

Ordonnancement des arguments :
1- Du plus fort au plus faible.

2- Du plus faible au plus fort.

3- Alternance fort / faible.

Il n'y a pas d'ordonnancement meilleur qu'un autre. Il faut toutefois éviter l'absence de structure.
Référence utile :
Louis Cornellier (2009). L'art de défendre ses opinions expliqué à tout le monde. Montréal : VLB éditeur.

29 décembre 2010

Pourquoi la lecture demeure-t-elle un acte si suspect ?

Malgré qu'elle soit valorisée, la lecture demeure suspecte aux yeux de la plupart des gens. Probablement parce qu'elle est un acte de vrai individualisme dans un monde qui, même s'il proclame le culte de l'individu, est profondément grégaire.

Lire c'est interpréter

Un livre possède assurément un sens plus ou moins général (celui que l'auteur lui a donné). Mais, chaque lecteur donne au contenu d'un livre un sens particulier en l'interprétant en fonction de ses propres expériences et de ses questions personnelles. En somme, lire c'est interpréter, c'est à dire entrer en dialogue avec un auteur et recréer ainsi un sens nouveau (qui peut ne pas être très éloigné de celui voulu par l'auteur).

26 décembre 2010

L'humanisme

L'humanisme est moins affirmation que questionnement. Questionnement sur l'Homme, sur ce qu'il peut accomplir, ce qu'il peut devenir. Questionnement sur les chemins pour mener à cet accomplissement. L'humanisme sait qu'accomplissement ne signifie pas point final. L'humain est toujours à construire, à parfaire. Son accomplissement est toujours devant. Surtout, l'humanisme ne cède pas au relativisme, au «tout se vaut», au défaitisme, au «à quoi bon». Malgré l'ampleur des horreurs dont l'homme est capable, l'humanisme garde espoir en l'Homme. Cet espoir n'est pas triomphe, toute puissance, il est inquiétude, acceptation de la fragilité humaine, humilité. Autant dire qu'il s'agit là d'une posture difficile à tenir.

25 décembre 2010

Nous sommes tous des théoriciens !

Wellman (1990) identifie trois critères pour considérer un corps de connaissances comme une théorie :

1) La cohérence dans les idées et les concepts : il y aurait un continuum qui va des faits et des idées mal connectés à une théorie formelle (scientifique).

2) On établit des distinctions "ontologiques" entre les entités et les processus : une théorie aide à identifier qu'est-ce qui relève de son domaine et comment on peut catégoriser les objets à l'intérieur du domaine.

3) Une théorie fournit un "plan d'explication causale" des phénomènes qui relèvent de son domaine.

À partir de ces trois critères, il serait possible d'identifier des "théories personnelles" chez les individus.

Selon cette approche, une théorie n'est plus seulement quelque chose qui relève du champ de la science et des experts mais une activité commune à tous.

Référence : Wellman, H. (1990). The child's theory of Mind. Cambridge. MA : Bradford/MIT Press.

Pour bien enseigner la seule connaissance de la matière ne suffit pas

Dans un article qui relate une étude de cas (6 enseignants de niveau secondaire en anglais), Grossman (1989) contredit ceux qui affirment qu'une bonne connaissance de la matière et une bonne volonté sont suffisantes pour enseigner. Pour ceux-là les cours en pédagogie n'apportent rien. Or, Grossman montre qu'une formation pédagogique permet aux jeunes enseignants de mieux transformer "pédagogiquement" la matière. Cette transformation - en fournissant un cadre de pensée pour l'enseignement - se traduit dans la pratique en classe. Un cadre de pensée "plus pédagogique" influence la planification de cours et - élément important - la manière et ce que l'enseignant apprend de son expérience.
Référence : Pamela Grossman (1989). A study in contrast : sources of pedagogical content knowledge for secondary english. Journal of Teacher Education. septembre-octobre, p. 24-31.

Il faut agir et prendre des risques pour connaître

Hirschman (1967), souligne que :

1) les acteurs ne savent jamais très bien ce qu'ils veulent;
2) ils découvrent leurs buts, souvent nouveaux, à travers l'expérience (c'est-à-dire à travers les décisions qu'ils prennent).

Se référant à Adam Smith, l'auteur soutient que dans l'action, l'acteur n'est pas uniquement ou d'abord guidé par une main invisible (Hidden Hand) - comme le voulait Smith - mais il a également besoin d'une main cachante (Hiding Hand).

C'est cette main cachante qui permet à l'acteur de se lancer dans des actions. Pour apprendre quelque chose, il faut agir sans tout connaître. Pour apprendre, il faut prendre des risques.

Référence : A. Hirschman (1967). Development Projetcs Observed. Washington. Brookings Institution.

Sait-on toujours dans quoi on s'engage ?

Une personne ne peut s'engager dans l'action en fonction uniquement de ses préférences rationnelles. Plutôt, elle tire parti des situations rencontrées selon l'optique du "moindre mal". C'est seulement après qu'elle découvre ses préférences. Donc, ce dont il s'agit ici c'est non pas de calcul rationnel, mais plutôt de rationalisation. Aussi, tirer parti des situations peut conduire à la découverte et à l'adoption de nouvelles valeurs, de buts nouveaux. En sommes, le plus souvent c'est l'expérience qui permet de découvrir si une action présente réellement de l'intérêt. Une personne "efficace", compétente, est donc celle qui est capable de tirer profit des expériences que les circonstances lui imposent.
Référence : R.M. Cohen, J.G. March (1974). Leadership and Ambigity. New York. McGraw Hill.

Vous avez dit représentation sociale ?

Selon Moscovici (1984), une représentation sociale est un ensemble de concepts, de connaissances et d'explications qui reçoivent leur origine des interactions sociales quotidiennes entre les individus d'un même environnement social, économique, physique ou professionnel, etc. Une représentation sociale a pour but de rendre familier ce qui pourrait ne pas l'être. Lorsque des interactions sociales sont fondées sur des représentations partagées, elles ont tendance à unifier ces dernières et à les rendre encore plus opérationnelles. Les représentations sociales fournissent un ensemble d'attitudes et de comportements qui génèrent un style de conduite jugé acceptable dans un groupe donné.
Référence : S. Moscovici (1984). Psychologie sociale. Paris. PUF.

L'éducation au Moyen âge

Comparant le monde éducatif du Moyen âge chrétien et celui de l'antiquité, le sociologue français Émile Durkheim souligne que les deux sont profondément différents. Cette différence réside dans le fait qu'à la base du monde éducatif né sous la chrétienté, on retrouve "le sentiment que former un homme, ce n'est pas orner son esprit de certaines idées, ni lui faire contracter certaines habitudes particulières, c'est créer chez lui une disposition générale de l'esprit et de la volonté qui lui fasse voir les choses en général sous un jour déterminé"(p. 37). L'éducation au Moyen âge vise une action globale sur l'entièreté de la personne. Faire de l'homme un chrétien.
Référence : Émile Durkheim (1969). L'évolution pédagogique en France. Paris. PUF, première édition parue en 1938).

Le pouvoir légitime

Notre monde connaît bien plus de pouvoirs non légitimes que l'inverse. Mais qu'est-ce qu'un pouvoir légitime ? Selon Bourricaud (1961), on peut reconnaître le pouvoir légitime au fait qu'il prétend imposer aux individus des ordres rationnels ou - à tout le moins - raisonnables. Mais, surtout, on le reconnaît au fait qu'il permet sa remise en cause et que cette remise en cause le porte à se légitimer auprès des individus. En somme, le pouvoir légitime est celui qui, tout en étant rationnel, laisse une place au débat et à la contestation. Référence : F. Bourricaud (1961). Esquisse d'une théorie de l'autorité. Paris. Plon.

24 décembre 2010

L'incident critique en enseignement

L'incident critique est au principe même du rapport subjectif qu'entretient l'enseignant à son rôle et à sa profession.

Il s'agit d'événements ayant revêtu une particulière importance pour la carrière et l'identité des enseignants.

Les incidents critiques "surviennent sous la forme de difficultés avec les élèves pendant la socialisation dans la profession. Souvent ils naissent de défis lancés par les élèves qui adressent de nouvelles demandes à l'enseignant et exigent une profonde recherche de caractère. Les incidents sont dits "critiques" en ce qu'ils portent au premier plan une série d'événements ou de sentiments qui se sont édifiés en un temps donné et qui établissent pour longtemps les règles fondamentales de l'interaction" (p. 120).
Référence: Woods, P. (1990). L'ethnographie de l'école. Paris. A. Colin.

Une vision de la connaissance des enseignants

Des auteurs - dans la mouvance du courant narratif - rejettent l'idée qu'il puisse exister une connaissance généralisable en enseignement. La connaissance des enseignants serait pour eux quelque chose de personnelle et organisée sous forme d'histoires et de narrations. Par conséquent, la connaissance des enseignants pourrait être comprise beaucoup mieux par le recueil des histoires personnelles des praticiens. Cette manière de procéder comporterait d'ailleurs des avantages dont : 1) préserver la voix des enseignants; 2) assurer le recueil de leur propre perspective. La connaissance des enseignants serait principalement tacite, contenue à l'intérieur de rituels, de routines et incluse dans des contextes locaux, particuliers. Il n'y aurait donc plus ici de distinction nette entre connaissance et pratique en classe.
Référence : Clandinin, D.J., Connelly, M.F. (1987). Teachers' personal Knowledge : What counts as personal in Studies of the personal. Journal of Curriculum Studies, 19, 6, p. 487-500.

23 décembre 2010

L'absurdité du monde

Parfois, les événements nous placent devant l’absurdité du monde. Cette prise de conscience est toujours douloureuse et n’est pas sans laisser des traces en nous. Et, lorsque ce qui nous a révélé l’absurdité du monde est un événement grave qui nous atteint personnellement, il peut devenir difficile de redonner du sens à la vie. Vivre devient alors comme un numéro d’équilibriste où la chute est toujours possible.

Et l'Être ?

Dans la déferlante moderne, la question de l’Être a été abandonnée au profit d’une concentration sur la rationalité instrumentale qui ne peut concevoir le monde que comme une ressource à exploiter. Cet oubli est-il une course à la mort ? Possible ! En tout état de cause, il s’agit assurément d’une autre expression de notre impressionnante faculté à nous aliéner nous-mêmes.

Peut-on encore penser le monde autrement

Penser le monde a toujours été le fait d’une petite minorité d’intellectuels. Mais, le discours de cette minorité de penseurs semble de plus en plus marginalisé. En fait, triomphe actuellement une doxa économico-politique qui lamine nos sociétés, ramenant tout à la logique pragmatique de la rentabilité comptable. Cette doxa veut nous faire croire que l’homme est «naturellement» fait pour la concurrence, l’inégalité, la cupidité. Elle nous propose un monde terne où règne la pauvreté pour la majorité et l’opulence pour une infime minorité, un monde où des «lois économiques» déterminent le devenir du monde. Rien de plus déprimant ! Le monde de l’homme est ce qu’il en fait. Nous ne sommes soumis à aucun déterminisme économique. Nous sommes plutôt actuellement dominés par une caste de barons de la finance appuyés par leurs mercenaires. L’histoire de l’humanité montre cependant que les sociétés changent, les cultures se transforment, les régimes politiques tombent, les classes dirigeantes perdent leur statut au profit d’autres groupes. Se laisser aller au fatalisme c’est faire le jeu de ceux qui profitent de la situation actuelle.

Le temps

Il passe, ne peut être arrêté dans sa course. Il nous échappe, parfois donne l’impression d’accélérer, parfois de faire du surplace. Le temps nous englobe. Nous lui appartenons plus qu’il ne nous appartient. Le temps, finalement, gagne toujours.

Un rêve trahi

Dans le climat d'inculture généralisé où nous vivons, il y a de moins en moins de gens capables d'apprécier les grandes oeuvres artistiques. Le rêve des Lumières de démocratiser la culture, la connaissance, l'éducation, est trahi chaque jour pour le plus grand profit d'une industrie du divertissement qui fait des affaires d'or.

Crise de sens

Nous sommes «déboussolés», nous tournons en rond, nous cherchons sans savoir quoi exactement, nous essayons tout, nous changeons pour changer, bref, nous vivons une crise du sens. Marcheurs aveugles, nous nous dirigeons sans but vers nulle part.

Des démocraties bien imparfaites

En démocratie le pouvoir doit appartenir au peuple, via ses représentants politiques. Or, nos sociétés donnent à voir des démocraties bien imparfaites où lobbyistes, puissances de l'argent, groupes d'intérêts de toutes sortes, influencent les gouvernements non pas au nom du bien public mais au nom de leurs seuls intérêts. Nos démocraties sont à parfaire.

Le mal des démocraties

Nos démocraties souffrent d'un mal profond que les Grecs de l'époque de Socrate et de Platon ont connu : la démagogie, le populisme de bas étage. L'abandon d'un idéal d'éducation hérité des Lumières et la montée du libéralisme économique ne sont pas étrangers à cette lente destruction de nos démocraties.

Une révolution qui a mal tourné

La révolution sexuelle était nécessaire. Elle a eu du bon. C’est une évidence. Mais elle a aussi entraîné des effets secondaires nuisibles. Surtout, elle a été récupérée par les marchants. Le sexe maintenant est une marchandise que l’on vend. Plus encore, en matière de sexualité et de séduction nous sommes devenus des produits. On se met en marcher. Ironie que ce qui était à l’origine une idéologie contre le capitalisme en est maintenant devenu un allier.

Le doute

Le doute est en bien des cas un salutaire compagnon, la certitude, trop souvent, une amie qui vous ment.

Petite réflexion d'un chercheur en SHS

L'enquête :
Elle comporte essentiellement trois phases : exploration, focalisation, confirmation. En recherche qualitative, l'analyse se fait tout au long de l'enquête en même temps que la cueillette de données. Ces deux processus s'influencent mutuellement. Les trois phases ne sont donc pas trois moments séparés mais plutôt imbriqués les uns dans les autres.

Deux types de données :
Des données invoquées : Antérieures à la recherche et donc indépendantes du chercheur.
Des données suscitées : Concomitantes à la recherche et donc dépendantes du chercheur.

Étude de cas :
Son usage est intéressant lorsque l'on souhaite prendre en comptre à la fois l'individu, le processus, le contexte. On doit savoir ici que ces trois éléments s'influencent mutuellement et surtout que l'individu et le processus ne peuvent être compris qu'en contexte.

Vérité :
Dans le sens commun, la vérité signifie «adéquation au réel». Or, les expériences qui interrogent le réel produisent plus qu'elles ne recueillent les faits. Ainsi, la vérité sera moins une adéquation au réel que l'énoncé qui génère de bonnes questions. L'énoncé vrai sera donc celui sur lequel le chercheur peut s'appuyer pour faire avancer la réflexion.

L'universel :
Il y a deux façons de concevoir l'universel : 1- ce qu'il s'agit de découvrir, ce à quoi il faut accéder et qui existe en dehors de nous; 2- le résultat - nécessairement fragile - d'un processus social d'universalisation. Ici, l'universel est moins un donné à atteindre qu'une convention à établir.

Un vieux débat en philosophie

Traditionnellement en philosophie un pense l'homme selon deux points de vue : le sujet transcendantal (pensons à Descartes) et l'homme réduit à la seule matière (le matérialisme qui s'incarne de nos jours dans une certaine neuroscience). Une troisième voie existe toutefois. Il s'agit de celle qui représente l'homme comme action. Ici, l'homme n'est pas un sujet tout puissant ni un être réduit à ses déterminismes naturels (et dont le comportement est explicable par des lois). L'homme est action, c'est à dire qu'il est ce qu'il fait de lui-même à travers les actions qu'il pose sur le monde matériel et sur le monde humain. Cette tentative de dépassement du débat classique présente donc l'homme comme praxis au sens où il ne possède pas d'identité clairement définie. Il est celui qui essaie toujours de se définir.

Sphères de la reconnaissance

Le philosophe allemand Axel Honneth, successeur de Jürgen Habermas (dans la continuité de l'École de Francfort), pose que la question la reconnaissance est le grand enjeu social de notre époque.

Il identifie trois grandes sphères de la reconnaissance dans nos sociétés modernes :

1- le cercle familial et l'amitié : reconnaissance de l'être de besoins affectifs.

2- le domaine politique : reconnaissance de l'être de droits, la citoyenneté.

3- le domaine de l'activité productive : reconnaissance de l'être de capacités et de compétences.

Honneth est un auteur incontournable pour qui veut comprendre le monde contemporain.

L'attention en phénoménologie

Schématiquement, on peut repérer trois types de qualité de l'attention dans l'analyse phénoménologique :

1- Une attention focalisée : qui porte sur un objet, qui ne se perd pas dans tout.

2- Une attention ouverte : l'épochè ! La vigilance face à ce qui peut émerger.

3- Une attention continue : le maintien de l'attention dans le temps, l'attention phénoménologique n'est pas une attention passagère.

Ces trois types d'attention ne sont pas des garanties de succès dans l'analyse phénoménologique mais des conditions minimales.

Le sens de la vie

La vie a - t - elle un sens ?
C'est la question que pose le philosophe Jean Grondin.
Il répond que le sens de la vie peut être vu de quatre manières :
1- La vie a un sens directionnel. C'est la dimension temporel du sens. La mort se trouve au bout. Au terme de notre vie, peut-être nous demanderons-nous : Pourquoi ai-je vécu ?
2- Le sens de la vie peut aussi être compris en terme de signification. Notre vie a - t -elle une signification ? Plusieurs philosophes dans l'histoire ont répondu oui. Ce sens de la vie pour eux c'est le Bien.
3- Le sens de la vie évoque également notre capacité à «sentir». Ici, on pense à notre capacité à goûter la vie, à la sentir en nous et autour de nous.
4- Finalement, le sens de la vie peut aussi signifier notre capacité à apprécier de manière réfléchie le monde des choses et des hommes. C'est ici que la philosophie peut être particulièrement précieuse.
Ces quatre sens se chevauchent et nous questionnent dans un monde où les réponses ne vont plus de soi. L'essentiel est de questionner.

Référence :
Jean Grondin (2003). Du sens de la vie. Montréal : Bellarmin. Collection L'essentiel.

Un témoin de l'homme

Fernand Dumont, sociologue, philosophe, théologien, fut un des plus grand intellectuel du Québec. Je propose ici quelques courts extaits d'un ouvrage qui compile des entrevues qu'il a accordées tout au long de sa carrière. La référence à cet ouvrage est : Fernand Dumont «Un témoin de l'homme. Entretiens colligés et présentés par Serge Cantin». Montréal, L'Hexagone, 2000.

«Je ne crois pas qu'on devienne intellectuel parce qu'on est plus fin ou plus intelligent que les autres : on devient intellectuel parce que, sur le plan sentimental, on est destiné à une sorte de solitude que, heureusement, dans certains cas - parce que ça ne se produit pas toujours -, la vie intellectuelle vient combler, vient meubler». (p. 42)

«[...] la théorie commence avec le refus affectif d'un certain type d'explication des choses et non pas parce qu'on aurait réuni un certain nombre de données susceptibles d'être mises ensemble». (p. 69)

«La pédagogie ne consiste pas à transmettre du savoir, mais plutôt à réconcilier les savoirs entre eux à travers des personnes concrètes». (p. 97)

«[...] ce ne sont pas les valeurs qui sont en crise, mais plutôt le rapport entre les valeurs et les institutions qui les supportent» (p. 113)

«Nous vivons dans une société dure, une société qui contredit ses propres paroles concernant la réalisation de soi, le bonheur, la consommation». (p. 173)

«Nous sommes en présence d'une crise de civilisation». (p. 193)

«La crise que nous vivons présentement n'est pas une crise de vérité, c'est une crise pertinence». (p. 203)

Sur les inégalités

Notre monde est de plus en plus inégal. Les pauvres s'appauvrissent, les riches s'enrichissent. Et, le groupe des riches est de plus en plus restreint car celui des pauvres grandit. Cela on le sait, on l'a entendu maintes fois. Le problème c'est que ce n'est pas un mythe. C'est malheureusement vrai. Bien des intellectuels le déplorent : François Dubet en France, Axel Honneth en Allemagne, Riccardo Petrella en Belgique, Joseph Stiglitz aux USA, Michel Freitag au Québec (un grand penseur malheureusement aujourd'hui décédé) etc. Or, l'aspiration à l'égalité lui n'est pas disparu bien au contraire. Il prend la forme d'une demande de reconnaissance (voir là-dessus les travaux d'Axel Honneth). Entre l'égalité et la liberté, nous devons naviguer à vue. Trop de l'une étouffe l'autre. S'il ne saurait y avoir de réponses toutes faites et immuables, on ne peut par contre renoncer à chercher le meilleur amalgame. Se contenter du statu quo actuel (qui se traduit au fond par plus d'inégalités et moins de liberté pour la très grande majorité des citoyens du monde) c'est s'enfermer dans la grisaille d'un monde sans espoir fait uniquement pour les puissants.

Quelques propos de Rob Riemen

Parce que lire nourrit l'esprit, j'offre ici quelques belles citations tirées d'un non moins bel ouvrage de Rob Riemen :

«Quel est l'avenir de la démocratie, des libertés politiques, si les gens ne savent plus quelle est l'essence de la liberté ? Ne réfléchissent plus et ne sont plus guidés par la raison, mais par la superstition, les émotions, la peur, les passions et la sujétion ?» (p. 48).

Anéantir la culture, c'est anéantir la vérité. Et anéantir la vérité, ce n'est rien moins que priver l'homme de sa dignité.» (p. 77)

«Sans noblesse d'esprit, une démoncratie meurt de sa propre liberté.»
(p. 133)

«Sans liberté, pas de culture, mais si la culture est mise à l'index, toute liberté est vide de sens, et ne subsistent qu'arbitraire et trivialité.» (p. 179)

Référence : Riemen, Rob (2009). La noblesse de l'esprit. Un idéal oublié. Paris : Nil éditions.

Globalisation

La globalisation est la machine de guerre du néolibéralisme qui vise à étendre à toutes les sphères de l'activité humaine la seule logique marchande. En cette ère du capitalisme financier, devenu tentaculaire, nous risquons de voir disparaître tout ce qui fait que les socitétés sont bel et bien des sociétés : leur capacité d'autorégulation normative. La globalisation est en train d'imposer à l'échelle planétaire une seule logique : la logique marchande du profit rapide. Il est impératif de combattre cette tendance néfaste afin que les citoyens (donc les sociétés) via leurs États redeviennent pleinement les acteurs de leur avenir.

Travailler sur soi

Le travail sur soi pour accéder à un niveau de conscience et d'éthique supérieur est long et difficile. On ne sait jamais quand, au détour d'un événement fâcheux ou joyeux, on va régresser, choire. Mais, travailler sur soi, sans narcissisme, est un engagement qui, s'il était pris et maintenu par chacun d'entre nous rendrait le monde meilleur.

En ces temps troublés (mais, y a-t-il eu des temps calmes ?) que pouvons-nous faire, hommes et femmes ordinaies ? Bien peu et beaucoup. Si certains s'engagent dans des causes sociales à proximité ou au loin, d'autres, simplement, tentent de mener une bonne vie, une vie droite, honnête, témoignant de leur personne, donnant l'exemple.

Il est plus facile d'être complaisant envers soi-même que d'être sévère envers soi. Mais, notre valeur ne se mesure-t-elle pas en partie sur la base de cette sévérité ?

Mode de pensée dominant

Dans un monde soumis à l'individualisme devenu egocentrisme, le mode de pensée sociologique trouve difficilement à s'exprimer sur la place publique et dans les consciences individuelles.

En fait, individuellement, il est plus confortable de croire que nous nous faisons par notre propre volonté, que nous nous produisons nous-mêmes.

Et, collectivement (pour les pouvoirs en place quels qu'ils soient), il est préférable que les inégalités sociales, les rapports de pouvoir, les structures de domination soient perçus comme des «objets naturels» plutôt que pour ce qu'ils sont : des construits sociaux.

Crise économique

En 2008 le monde a été plongé dans une crise économique très grave.

Pourquoi ?

En raison de la logique même du capitalisme financier qui repose sur la recherche du pouvoir économique, du profit au moyen de la spéculation. Économie basée sur la cupidité ! Et, qui paie pour ce gâchi ? Les riches ? Non, les pauvres, les très pauvres d'abord et, ensuite, les classes moyennes.

Or, à l'évidence nous ne savons pas tirer des leçons de cette crise.

Scientificité en sciences humaines et sociales

La science est une pratique sociale «comme les autres» mais comme toute pratique sociale elle possède des caractéristiques qui lui sont propres. L'une de ces caractéristiques est de ne pas prendre pour acquis les catégories de perception et de classification des acteurs. La recherche doit donc construire ses propres catégories de perception et de classification chaque fois que cela est nécessaire.

Qu'est-ce qu'une représentation sociale ?

Il s'agit d'un ensemble de concepts plus ou moins formalisés, de connaissances et d'explications plus ou moins précises qui reçoivent leur origine des interactions sociales entre les acteurs qui partagent un même environnement social, économique, physique ou professionnel, etc. Une représentation sociale a pour utilité de permettre de rendre familier ce qui pourrait ne pas l'être. Lorsque des interactions sociales sont fondées sur des représentations partagées, elles unifient ces dernières et les rendent encore plus opérationnelles. Les représentations sociales fournissent ainsi un ensemble d'attitudes et de comportements qui génèrent un style de conduite jugé socialment acceptable.

L'efficacité des enseignants

Le principe explicatif de l'efficacité des enseignants réside dans leurs attentes exprimées dans leurs activités pédagogiques :
1) dès le début de l'année scolaire, l'enseignant forme des attentes différentes selon les élèves;
2) selon les attentes, il se comporte de manière différente envers ses élèves;
3) ce traitement différentiel indique à l'élève quel est le comportement et la performance attendus de lui; cela influence l'image qu'il a de lui-même, sa motivation et aussi son niveau d'aspiration académique;
4) si l'enseignant se comporte de manière constante et cohérente avec ses attentes et si l'élève ne résiste pas directement ou ne modifie pas sa façon d'être, il aura tendance à ajuster ses performances scolaires et son comportement en classe selon les attentes de l'enseignant;
5) petit à petit, les performances et attitudes de l'élève seront de plus en plus conformes aux attentes de l'enseignant.

20 décembre 2010

Ce qu'on désir

Le désir est étrange. Il nous domine parfois mais pourtant il vient de nous. Surtout, le désir ne cherche pas vraiment un objet pour le combler. Le désir est à la recherche de l'intensité. La quête de l'objet est l'occasion de cette intensité. Une fois l'objet trouvé, l'intensité diminue et le désir se porte ailleurs pour retrouver à nouveau cette intensité.

18 décembre 2010

Pas de limite au mensonge

L'idéologie du néolibéralisme ne recule devant aucun mensonge pour aliéner la population et faire accepter son agenda : tout privatiser, enrichir les plus riches, réduire tout rapport social à un rapport marchand, réduire la démocratie au minimum. Relayer par des organes médiatiques qui leur appartiennent, le discours des puissances de l'argent peut s'incruster chez le bon peuple. Inonder par la pensée néolibérale, par les idées qui vont dans le sens des seuls intérêts des puissants, le peuple finit par croire (c'est voulu) que la pensée des puissants est dans l'intérêt de tous. L'une de ces idées - que le peuple doit croire - est justement que le programme de la droite économique relève de la loi naturelle à laquelle personne ne peut échapper....un peu comme la notion de destin chez les anciens...on ne peut que s'y plier et l'accomplir. Le discours critique de cette idéologie existe et est bien articulé mais il est relégué à la marge; malheureusement.

08 décembre 2010

La «nordicité» du Québec

La plupart des Québécois n'aiment pas l'hiver : trop froid, trop de neige, trop long. Le peuple québécois est un peuple nordique qui n'a jamais assumé sa «nordicité». Au Québec on aime détester l'hiver mais en même temps on se flatte de ce que cette saison a fait de nous. En effet, l'hiver a façonné notre mode de vie, notre culture, notre psyché collective. Il est en nous, il est une part de nous. En fait, dans son rapport à l'hiver, le Québec démontre son éternelle ambivalence. Comme en politique, il hésite entre deux options. Son rapport à l'hiver est emblématique de son ambiguïté identitaire.